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Petite incursion dans les archives de l'INPI

Bien dégagé derrière les oreilles !

PIBD 1147-IV-4
Par Amandine Gabriac
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Par Amandine Gabriac, chef de projet archivage à l'INPI

Rien de mieux qu’un rendez-vous chez le coiffeur pour se remettre en beauté, notamment après un confinement ! Tour d’horizon du salon de coiffure et de ses accessoires, du XIXe siècle à aujourd’hui, à travers les titres de propriété industrielle conservés par l’Institut national de la propriété industrielle.

Les salons de coiffure n’apparaissent qu’à la fin du XIXe siècle : l’histoire retient l’année 1888 comme celle de l’ouverture du premier salon de coiffure dans la ville américaine de Rochester. C’est une révolution : coiffer les femmes dans une boutique dédiée, alors que se faire coiffer en public était jusqu’alors jugé indécent. Les hommes pouvaient déjà bénéficier de soins chez les barbiers en ville, mais, pour les femmes, il était de mise que ce soit la servante qui s’en occupe. Toutefois, il faut attendre le début du XXe siècle pour que les salons, en grand nombre, s’ouvrent aux femmes.

Pour autant, les inventeurs s’intéressent très tôt à la question des cheveux - et, spécialement, des cheveux des femmes, des coiffures élégantes et du matériel adapté pour sécher, friser, boucler, bref coiffer les cheveux. On compte ainsi plus de neuf cents brevets d’invention relatifs aux cheveux, à la coiffure et aux soins capillaires entre 1804 et 1901. Question cheveux, tous les problèmes sont abordés : chute de cheveux, implantation, coloration, toupets et perruques, épingles, coiffures toujours plus élaborées et élégance à toute épreuve.

Le terme « coiffure » désigne alors aussi bien l’arrangement des cheveux que les coiffes et autres chapeaux. En effet, le XIXe siècle est également celui qui voit l’élaboration de coiffures toujours plus élégantes et sophistiquées. C’est le cas, par exemple, du brevet d’invention déposé par Blaise Bontems en 1868 pour une application des oiseaux et des papillons mouvants aux parures et aux coiffures de dames, etc. L’inventeur prévoit, par un petit moteur, de faire bouger les ailes des papillons et des oiseaux posés sur les coiffures.

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Brevet d’invention de 15 ans n° 1BB79543 déposé le 13 février 1868 par Blaise Bontems pour l’application des oiseaux et des papillons mouvants aux parures et aux coiffures de dames, etc.
Brevet d’invention de 15 ans n° 1BB79543 déposé le 13 février 1868 par Blaise Bontems pour l’application des oiseaux et des papillons mouvants aux parures et aux coiffures de dames, etc.
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En France, l’équipement du salon de coiffure occupe aussi largement les esprits inventifs, qu’il s’agisse d’un mobilier adapté ou d’accessoires novateurs et perfectionnés pour coiffer. Ainsi, en 1863, Richard Thomas dépose un brevet d’invention pour des perfectionnements dans les appareils à onduler les cheveux : un ancêtre du fer à friser, avec deux plaques métalliques ondulées et chauffées dans lesquelles les cheveux sont pincés.

Brevet d’invention de 15 ans n° 57119 déposé le 21 janvier 1863 par Richard THOMAS pour des perfectionnements apportés dans les appareils à onduler les cheveux
Brevet d’invention de 15 ans n° 57119 déposé le 21 janvier 1863 par Richard Thomas pour des perfectionnements apportés dans les appareils à onduler les cheveux
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Deux ans plus tard, en 1865, Charles Edward Bryant et Samuel Middleton déposent un brevet d’invention de quinze ans pour un appareil servant à brosser les cheveux. Le dispositif n’est pas banal : au-dessus, à côté ou derrière une chaise mobile, les inventeurs prévoient de placer un rouleau pour le brossage des cheveux. Un dispositif de pédale met en mouvement la brosse, l’opérateur n’a plus qu’à diriger la brosse au-dessus de la tête à coiffer.

Brevet d’invention de 15 ans n° 67142 déposé le 13 avril 1865 par Charles-Edward Bryant et Samuel Middleton pour un appareil servant à brosser les cheveux
Brevet d’invention de 15 ans n° 67142 déposé le 13 avril 1865 par Charles-Edward Bryant et Samuel Middleton pour un appareil servant à brosser les cheveux
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L’inventeur Joseph Vibert prévoit, en 1892, une sorte de sèche-cheveux qu’il appelle nouveau séchoir capillaire à cuvette : un autre équipement du salon de coiffure. Il précise : « la présente demande de brevet a pour but de me garantir un nouvel appareil pour coiffeur, destiné au lavage et au séchage des cheveux d’hommes et spécialement de femmes. Comme, dans la pratique, il convient de diminuer autant que possible, le nombre d’appareils encombrants, cela aussi bien pour les cabinets de coiffeurs, que chez les particuliers, j’ai imaginé de réunir en un seul appareil la cuvette qui sert à laver et à nettoyer les cheveux  et le séchoir qui sert à enlever toute trace d’humidité ». La planche représente ainsi à gauche, une femme se faisant laver les cheveux avec la cuvette disposée en dessous, et à droite le dispositif de séchage. Il s’agit là d’un ancêtre du casque sèche-cheveux, bien connu de tous, déposé par Calor ou Moulinex dans les années 1960. Le début du XXe siècle verra quant à lui de nombreux dépôts pour des fauteuils de salon de coiffure adaptés pour les femmes ou pour les hommes, souvent orientables et inclinables.

Brevet d’invention de 15 ans n° 225127 déposé le 22 octobre 1892 par Joseph Vibert pour un nouveau séchoir capillaire à cuvette
Brevet d’invention de 15 ans n° 225127 déposé le 22 octobre 1892 par Joseph Vibert pour un nouveau séchoir capillaire à cuvette
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Laver, sécher, brosser, friser : toutes les étapes sont ainsi perfectionnées par les inventeurs. Une étape supplémentaire apparaît au début du XXe siècle avec la teinture inoffensive pour cheveux mise au point en 1907 par Eugène Schueller, fondateur de la marque Oréal qui deviendra plus tard L’Oréal. Pour l’anecdote, le nom de la marque vient d’une coiffure nommée « auréale », très à la mode au début du XXe siècle.

Dessin et modèle n° 17354 déposé le 27 octobre 1928 par Eugène Schueller pour une Création destinée à la publicité, affiches ou autres
Dessin et modèle n° 17354 déposé le 27 octobre 1928 par Eugène Schueller pour une Création destinée à la publicité, affiches ou autres
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Les marques de fabrique et de commerce ne sont pas en reste : toutes sortes de marques de lotions pour parer à la perte de cheveux, leur redonner force et brillance, sont déposées. Les déposants promettent souvent une pousse rapide, spectaculaire, parant efficacement la calvitie. Certaines relèvent, à n’en pas douter, de la publicité mensongère !

Marque de fabrique et de commerce déposée le 29 mars 1883 par Paul-Charles Pinsa, parfumeur, destinée à un produit de parfumerie (1MA435 p. 126, Archives INPI)
Marque de fabrique et de commerce déposée le 29 mars 1883 par Paul-Charles Pinsa, parfumeur, destinée à un produit de parfumerie (1MA435 p. 126, Archives INPI)

 Longs, courts, bouclés, frisés, teints ou blancs, des coiffures les plus délicates aux promesses les plus charmantes, les cheveux et leurs soins n’en finissent pas de se réinventer.

Cet article a également été publié dans le Journal spécial des sociétés du19 septembre 2020, n° 56, p. 18.