Jurisprudence
Brevets

Demande en annulation d'un contrat de partenariat - Compétence matérielle

PIBD 1145-III-1
CA Paris, 28 janvier 2020, avec une note

Demande en annulation ou en résiliation d’un contrat de partenariat - Compétence matérielle du TJ Paris (oui) - Compétence exclusive - Lien de connexité avec la demande en revendication de propriété de brevet

Texte

En application de l’article L. 615-17 du CPI et de l'article D. 211-6 du Code de l'organisation judiciaire, le tribunal judiciaire de Paris (anciennement tribunal de grande instance) a compétence exclusive pour connaître des actions en matière de brevets d'invention et des questions connexes de concurrence déloyale. Cette prorogation légale de compétence est d'interprétation stricte. Toutefois, il est admis que les litiges ne relevant pas de la concurrence déloyale, mais mettant en œuvre les règles spécifiques du droit des brevets nécessaires pour apprécier les obligations des parties, demeurent de la compétence du tribunal judiciaire de Paris.

En l’espèce, la société demanderesse a requis l'annulation ou du moins la résiliation du contrat de partenariat conclu avec la partie adverse, en raison d’une violation par cette dernière d'un engagement d'exclusivité et de la dissimulation du dépôt de plusieurs demandes de brevets couvrant le dispositif objet du contrat. Ces questions sont intimement liées à sa demande en revendication de la propriété de ces demandes de brevets.

Ainsi, l'examen de la demande relative au contrat conduira la juridiction saisie à analyser et comparer le contenu des informations confidentielles à caractère technique transmises par la société demanderesse à sa co-contractante et la portée des demandes de brevet déposées par cette dernière, telle qu'elle résulte de leurs revendications, ce qui relève indiscutablement de la technique des brevets. De plus, l'examen de la demande en revendication de la propriété des titres supposera nécessairement de vérifier s’ils reprennent dans leurs revendications les informations confidentielles.

Dès lors, la demande de nature contractuelle et les demandes indemnitaires en découlant se rattachent par un lien de connexité très étroit à la demande en revendication des brevets, leur examen nécessitant la mise en œuvre des règles spécifiques du droit des brevets. Elles entrent dans le champ des « demandes relatives aux brevets d'invention » au sens de l'article L. 615-17 CPI. Le tribunal judiciaire de Paris est donc seul compétent pour statuer sur l’ensemble des demandes.

Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 28 janvier 2020, 2019/08700 (B20200025)
Hydro Building Systems France SARL c. Saint-Gobain SEVA SAS
(Infirmation partielle TGI Paris, ord. juge de la mise en état, 19 avr. 2019, 2017/09762, B20190087)

Titre
NOTE :
Texte

Le Code de la propriété intellectuelle, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services, prévoit que les actions civiles et les demandes relatives à un titre de propriété industrielle, y compris lorsqu'elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux judiciaires, déterminés par voie réglementaire (articles L. 521-3-1 pour les dessins et modèles nationaux, L. 522-2 pour les dessins et modèles communautaires, L. 615-17 pour les brevets, L. 716-5 (anciennement L. 716-3) pour les marques nationales et L. 717-4 pour les marques de l’Union européenne).

Dans une affaire concernant des modèles communautaires, citée dans la décision commentée, la Cour de cassation (Cass. com., 6 sept. 2016, La Redoute c. Abdallah B et al., U/2015/16108 ; D20160141 ; PIBD 2016, 1058, III-823 ; RJDA, nov. 2016, p. 846 ; Comm. com. électr., oct. 2016, p. 26, note de C. Caron ; Propr. industr., déc. 2016, p. 35, note de L. Marino ; RLDI, 132, déc. 2016, p. 52, note de G. Pacault ; RTDCom, 4, oct.-déc. 2016, p. 755, note de F. Pollaud-Dulian ; arrêt de renvoi : CA Paris, pôle 5, 1re ch., 6 févr. 2018, 2017/10015 ; D20180009) a dit que « la prorogation légale de compétence du tribunal de grande instance prévue par ce texte [article L. 522-2 du CPI] ne trouve application qu'à  l'égard d'une question connexe de concurrence déloyale ». Elle a cassé l’arrêt d’appel (CA Paris, pôle 5, 2e ch., 21 nov. 2014, 2014/03673 ; D20140218) qui avait estimé qu’il apparaissait utile de juger ensemble les faits de contrefaçon et de concurrence déloyale, ainsi que ceux relatifs à la rupture brutale d'une relation commerciale établie et à l'abus de dépendance économique, en raison du lien entre ces actions et de l'influence potentielle de la solution donnée à chacune d’elles. La solution dégagée par la Cour suprême peut être étendue à tous les droits de propriété industrielle.

La compétence matérielle du tribunal judiciaire désigné pour connaître des affaires en droit de la propriété industrielle connaît des limites lorsque sont présentées des demandes principales ou, plus rarement, reconventionnelles en responsabilité contractuelle ou délictuelle ou encore relatives aux relations de travail entre un salarié et son employeur, lorsque ces demandes ont un lien avec un titre de propriété industrielle. Elle se heurte alors à la compétence d’autres juridictions spécialisées, tel le tribunal de commerce ou le conseil des prud’hommes, ou à celle d’un autre tribunal judiciaire, en application des règles de compétence de droit commun.

Il ressort des décisions récentes citées ci-dessous que la compétence exclusive du tribunal judiciaire spécialement désigné par les textes réglementaires s’applique lorsque le litige nécessite de statuer sur des questions mettant en cause les règles propres au droit de la propriété industrielle. Dans une affaire, la Cour de cassation (Cass. com, 5 juill. 2017, Cognac Ferrand SASU c. Grays Inc. Ltd, D/2016/14764 ; M20170347 ; PIBD 2017, 1080, III-689 ; Propr. intell., 66, janv. 2018, p. 76, note de J. Canlorbe) a approuvé une cour d’appel qui avait retenu la compétence du tribunal de grande instance de Paris, dès lors qu’il ressortait bien de l’arrêt que l’action tendant à l’exécution forcée d’un accord de coexistence de marques supposait, pour déterminer les obligations contractuelles de la société défenderesse et ses éventuels manquements, de statuer sur de telles questions.

En revanche, cette compétence exclusive ne se justifie pas en présence d’un contentieux qui n’implique aucun examen de l’existence ou de la méconnaissance d’un droit attaché au titre. Ainsi, la Cour de cassation (Cass. com., 16 févr. 2016, Enez Sun SAS et al. c. Europe et Communication SARL et al.,  X/2014/24295 ; B20160026 ; PIBD 2016, 1047, III-273 ; JCP G, 15, 11 avr. 2016, p. 729, note de C. de Haas ; D. IP/IT, mai 2016, p. 255, note de J. Daleau ; Contr. conc. cons., juin 2016, p. 46, note de M. Malaurie-Vignal ; Gaz Pal, 24, 28 juin 2016, p. 29, note de L. Marino) a estimé qu’une cour d'appel, constatant que le demandeur ne fondait sa demande que sur des actes de concurrence déloyale et de détournement de savoir-faire, « ce qui n'impliquait aucun examen de l'existence ou de la méconnaissance d'un droit attaché à un brevet », avait pu dire, à bon droit, que cette demande ne relevait pas de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris.

Dans la décision commentée, les juges du fond ont considéré que l’examen de la demande en annulation ou en résiliation du contrat de partenariat nécessitait la mise en œuvre des règles spécifiques du droit des brevets. Ils ont ajouté qu’il était de l’intérêt d’une bonne administration de la justice que cette demande ainsi que celle en revendication de propriété des brevets soient examinées par une seule et même juridiction, dès lors qu’elles « étaient toutes nées dans un contexte de droit de propriété intellectuelle et dans une même période temporelle alors que les parties se trouvaient en relations d'affaires ». Ce motif est toutefois très rarement invoqué.

Voici ci-dessous un panorama des décisions de justice rendues depuis 2015 sur ce sujet : 

  • Décisions ayant écarté la compétence exclusive du tribunal de grande instance spécialement désigné :

- CA Montpellier, 2e ch. civ., 27 févr. 2020, Cap Développement SAS c. André-Noël L, 2019/05131 ; M20200055 ; PIBD 2020, 1135, III-4 (compétence du TGI de Montpellier pour statuer sur une demande d’expertise judiciaire portant sur l’évaluation d’une marque à la suite d’une promesse de cession) :

« Or, en l’espèce, la demande d’expertise formée par la SAS Cap Développement sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile porte sur l’évaluation de la marque HISTOIRE DE PAINS à la suite d’une promesse de cession de Monsieur L, titulaire de cette marque, dont la SAS Cap Développement revendique le bénéfice et du désaccord des parties tant sur les conditions de formation de cette promesse de cession que sur ses modalités de mise en œuvre et particulièrement sur la valeur de la marque ainsi cédée. Le litige susceptible d’opposer les parties sur le fond est donc relatif exclusivement à la formation du contrat de cession et à son exécution, un tel litige n’impliquant pas l’application des règles spécifiques du droit des marques édictées par le Code de la propriété intellectuelle, mais celles du droit commun des obligations liant deux parties à un contrat dont la mise en œuvre relève, en conséquence, de la compétence du tribunal de grande instance de Montpellier […] et non du tribunal de grande instance de Marseille, le droit des marques n’étant pas en jeu au cas d’espèce. » ; 

- Cass. com., 18 déc. 2019, CDLR Studio Ltd et al. c. Gaîa R et al., W/2018/17364 ; D20190057 ; PIBD 2020, 1133, III-124 ; Contr. conc. cons., mars 2020, comm. 42, note de M. Malaurie-Vignal ; L'Essentiel, mars 2020, p. 7, note de P. Langlais (compétence du T. com. pour statuer sur une demande en concurrence déloyale fondée sur l’imitation de bijoux) :

« qu'ayant constaté que l'assignation introduite au visa de l'article 1240 du Code civil ne formulait aucune demande, qu'elle soit principale ou connexe, au titre de la propriété intellectuelle et énoncé que l'examen des prétentions au titre de la concurrence déloyale n'impliquait aucun examen de l'existence ou de la méconnaissance d'un droit de propriété intellectuelle, pour lequel le tribunal de grande instance a une compétence exclusive, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le tribunal de commerce était compétent pour connaître de l'action […]. » ;

- CA Colmar, 1re ch. civ., sect. A, 27 juin 2018, Normalu SAS c. Meunier EURL, 2017/04118 ; M20180282 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande reconventionnelle pour rupture brutale des relations commerciales action principale en contrefaçon de marque et en concurrence déloyale) :

« Or l'action en responsabilité pour rupture brutale de relations commerciales est fondée sur l'article L. 442-6 5° du Code de commerce, et non sur le droit commun de l'article 1382 ancien (1240 nouveau) du Code civil, applicable en matière d'actes de concurrence déloyale.
[…]
Il s'en déduit que la demande reconventionnelle formée par elle, tendant à voir constater la rupture brutale de relations commerciales l'ayant lié à la société Normalu, ne peut être jugée par le tribunal de grande instance de Strasbourg, qui n'en a pas le pouvoir juridictionnel. » ; 

- Cass. soc., 3 mai 2018, Compagnie IBM France c. Marek A, C/2016/25067 ; B20180023 ; PIBD 2018, 1095, III-364 ; Comm. com. électr., juill.-août 2018, p. 28, note de C. Caron ; L’Essentiel, juill. 2018, p. 4, note de P. Langlais ; Propr. intell., 70, janv. 2019, p. 86, note de C. de Haas (compétence du conseil des prud’hommes pour statuer sur une demande de rémunération supplémentaire pour une invention de salarié) :

« Mais attendu qu'ayant constaté que le salarié sollicitait le bénéfice de la rémunération supplémentaire pour invention en revendiquant l'application de l'article 75 de la Convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 (Syntec), ce qui n'impliquait l'examen, ni de l'existence ou de la méconnaissance d'un droit attaché à un brevet, non plus que d'un droit patrimonial sur un logiciel ou sa documentation, la cour d'appel en a exactement déduit que cette demande ressortissait à la compétence de la juridiction prud'homale. » ; 

- CA Paris, pôle 1, 1re ch., 17 oct. 2017, Le Fonds FCPR Cap Décisif 2 et al. c. Christian G, 2017/01407 ; B20170150 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande pour violation du pacte d’actionnaires prévoyant le transfert de brevets) :

« Mais considérant que la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris ne s’applique pas lorsque la demande est fondée sur des droits qui n’impliquent aucun examen de l’existence ou de la méconnaissance d’un droit attaché à un brevet ; que ne relèvent du contentieux de l’article [L. 615-17 du CPI] que les litiges qui puisent leurs éléments de solution dans des règles posées par la loi répondant à la finalité spécifique de la technique des brevets, à l’exclusion des instances fondées sur une règle tirée du droit commun des contrats, y compris lorsqu’elles sont relatives à l’exécution des clauses d’un contrat de licence ou de sous-licence ne mettant pas en cause le droit des brevets ;
[…]
que seule est discutée l’application du pacte d’actionnaire, et plus particulièrement la promesse de porte-fort souscrite par Monsieur G, qui s’était engagé à transférer les brevets dès lors qu’ils étaient nécessaires à l’activité de la société Silkan SA ; que cette appréciation, qui ne demande aucune analyse du droit des brevets résultant du Livre VI du Code de la propriété intellectuelle, relève du contentieux commercial de droit commun, les demandes des investisseurs étant fondées uniquement sur la violation par Monsieur G de ses obligations résultant du pacte d’actionnaire et de son obligation de contracter cette convention de bonne foi ; que ces demandes sont indépendantes du droit spécifique des brevets de sorte qu’aucune connexité ne peut être invoquée. » ; 

- TGI Paris, 3e ch., 3e sect., ord. JME, 19 mai 2017, Aero 3A SARL c. Activ Company, 2016/13772 ; M20170278 (compétence du T. com. pour statuer sur des demandes pour inexécution d’un contrat de prestation de services) :

« L’article 6 [du contrat de prestation de services] est intitulé ”propriété intellectuelle” et stipule que ”Aero 3A est et demeure le propriétaire des images tournées, montées et réalisées par les équipes mandatées par ses soins ”.
Cette attribution n’est donc pas conditionnée par un quelconque droit de propriété intellectuelle - qui n’est du reste pas invoqué - mais résulte de la seule application du contrat. De même, le fait que la société Activ Company se soit engagée à ne pas communiquer le savoir-faire de la société Aero 3A à des tiers et que ce savoir-faire ou ”know how” soit traité sous le même article 6 ne permet pas en soi de fonder la compétence exclusive invoquée.
Enfin, la prétendue atteinte à la confidentialité reprochée à Activ Company est présentée par la société Aero 3A elle-même comme une violation de l’article 8 du contrat.
La convention de prestation de service du 13 mai 2014 prévoit à son article 10 que ”en cas de litige, les deux parties conviennent que tout sera engagé pour aboutir à un accord amiable” et qu’à défaut ”le litige sera soumis à la juridiction du tribunal de commerce de Paris”.
En l’absence de tout droit de propriété intellectuelle invoqué, les inexécutions contractuelles alléguées, qui sont du reste pour partie opposées à titre reconventionnel devant le tribunal de commerce de Paris déjà saisi d’un litige portant sur le règlement de factures établies et relatives à des opérations réalisées dans le contexte du même ensemble de prestations, relève
[nt] de cette juridiction en application de l’article 10 précité. » ;

- CA Paris, pôle 1, 3e ch., 17 janv. 2017, The Watches Connections SASU c. Leslie Internationale SA et al., 2016/20024 ; M20170020 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande en résiliation de contrats de licence de marque) :

« Considérant que la demande en l’espèce porte sur la résiliation des contrats de licence de marque conclus entre les parties et ses conséquences pécuniaires et donc sur les manquements de la société TWC au regard de ses obligations contractuelles ; qu’il ne s’agit pas de la protection des droits sur la marque Lolita Lempicka, et que s’il est fait état dans le corps des écritures de l’atteinte portée à la notoriété de la marque du fait des manquements contractuels invoqués, elle doit être distinguée d’une atteinte au droit lui-même qui n’est pas en cause dans le présent litige ; que s’agissant d’un simple litige relatif à la bonne ou mauvaise exécution du contrat ne se fondant pas sur des dispositions du droit des marques mais sur le droit commun des contrats, il ne relève pas de la compétence exclusive du tribunal de grande instance mais, par application de l’article L. 721-3 du Code de commerce, du tribunal de commerce qui connaît des contestations relatives aux engagements entre commerçants. »  

- TGI Paris, 3e ch., 3e sect., ord. JME, 6 janv. 2017, Au Liégeur ETS J Pontneau Denis SAS c. Compagnie des Salins du Midi et des Salines de l’Est SAS, 2016/10989 ; B20170007 ; PIBD 2017, 1067, III-173 (compétence du TC pour statuer sur des demandes portant sur la rétrocession de quotes-parts de brevet et de modèle communautaire) :

«Toutefois la compétence exclusive du tribunal de grande instance est exclue pour les contentieux nés à l’occasion de l’exploitation de brevets d’invention ou de dessins et modèles, mais qui n’ont pas pour objet l’exploitation illicite de ces brevets ou de ces dessins et modèles et qui ne nécessitent pour être tranchés, aucun examen de l’existence ou de la méconnaissance d’un droit attaché à un titre de propriété intellectuelle. 
En l’occurrence, le litige porte sur le transfert de quote-part de brevet et de dessin et modèle au profit de la société CSME et quand bien même il s’inscrit dans un environnement de droits de propriété intellectuelle et que la matière relative à la copropriété d’un brevet fait l’objet d’une réglementation spécifique du Code de la propriété intellectuelle (L. 613-29 du Code de la propriété intellectuelle et suiv.), il n’en demeure pas moins que la juridiction devant être amenée à trancher le litige n’aura pas à se livrer à un examen de l’existence ou de la méconnaissance d’un droit attaché aux titres en question et notamment, à s’interroger sur la validité de ceux-ci et leur éventuelle contrefaçon» ; 

- CA Montpellier, 1re ch., sect. B, 7 sept. 2016, Novagraaf Technologies SA c. Chantal D et al., 2013/02029 ; B20160120 (compétence du TGI de Montpellier pour statuer sur une demande en paiement en exécution d’un mandat concernant le dépôt de brevets et une demande reconventionnelle en responsabilité contractuelle) :

« Le litige entre les parties ne concerne pas directement la consistance d'un brevet, sa validité, sa cessation ou encore une question connexe de concurrence déloyale, de sorte qu'il ne relève pas en l'espèce, au sens de l'article L. 615-17 du Code de la propriété intellectuelle, de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris, déterminée par voie réglementaire.
S'agissant des demandes reconventionnelles en dommages-intérêts, pour lesquelles les intimées demandent à la cour de se déclarer également compétente, elles s'analysent en une action de responsabilité civile contractuelle, dirigée à l'encontre du mandataire et qui peut être tranchée par les juridictions de droit commun.

[…]
Or, si la matière afférent aux brevets peut générer, le cas échéant, une difficulté particulière dans l'appréciation des préjudices subis et de leur réparation, le recours à l'expertise - ainsi que l'a envisagé le premier juge - peut permettre à suffisance aux juridictions de droit commun d'être éclairées sur la consistance des préjudices, les méthodes de calcul, sans que la matière des brevets ne justifie en elle-même de retarder l'issue à donner au litige par un renvoi de l'affaire devant les juridictions parisiennes. » ; 

- CA Paris, pôle 1, 2e ch., 12 mai 2016, Alesia Minceur SARL c. Patrick-Mickael S et al., 2015/22783 ; M20160215 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande en nullité de contrats de licence de marque) :

« Considérant qu’il est constant que les actions liées à la validité et à l’exécution d’un contrat de licence de marques relèvent de la compétence du tribunal de commerce et que les actions liées à la validité, la propriété d’une marque relèvent de la compétence exclusive du tribunal de grande instance ;
Considérant que force est de constater en l’espèce, que la société MBeauty remet en cause la qualification du contrat ainsi que sa validité et dénonce les fautes qui auraient été commises par la société Alesia Minceur dans le cadre de l’exécution du contrat ; qu’à aucun moment, elle ne critique la validité des marques elles-mêmes ;
Considérant encore que la clause attributive de compétence ne concerne que la compétence territoriale de la juridiction et que s’agissant de contrat passé entre deux sociétés commerciales portant sur les engagements pris, le tribunal de commerce est compétent conformément à l’article L 721-3 du Code de commerce. » ; 

- CA Paris, pôle 1, 3e ch., 12 avr. 2016, Senes SAS et al. c. Créations Claude Krieff SARL, 2015/22395 ; D20160051 (compétence du T. com. pour statuer sur des demandes en concurrence déloyale et pour parasitisme fondées sur la copie de vêtements) :

« Considérant que les demandes figurant au dispositif de l'assignation, qui saisit la juridiction commerciale, sont fondées sur l'article 1382 du Code civil ; que les références à la présomption de titularité des modèles litigieux sont destinées à caractériser la qualité à agir de la société Créations Claude Krief ; que si l'intitulé du paragraphe 6 relatif à la réparation des préjudices subis fait effectivement état d' actes de contrefaçon, le contenu du paragraphe qui suit vise exclusivement les actes de concurrence déloyale et de parasitisme, engageant la responsabilité délictuelle de leurs auteurs, avant de détailler les chefs de préjudice causés par ces seuls faits ;
Considérant qu'il s'en déduit que la demanderesse, qui certes invoque la titularité de droits de propriété intellectuelle, a entendu fonder ses demandes de réparation, non pas sur des atteintes à cette titularité mais sur des actes de concurrence déloyale dont elle s'estime victime ; que dès lors les dispositions de l'article L. 331-1 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce
[…]. » ; 

- CA Bordeaux, 2e ch. civ, 6 avr. 2016, Alésia Minceur SARL c. Valérie B et al., 2015/00154 ; M20160165 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande en nullité de contrats de licence de marque) :

« Dans son assignation devant le tribunal de commerce de Libourne, la société Valérie minceur demandait notamment la requalification des contrats de licence Cellu chicet Happy sourireen contrats de franchise, de les déclarer nuls pour dol et erreur sur la rentabilité, ou de prononcer leur résiliation. Plus généralement, elle n’émettait aucune demande relevant du droit des marques, de la concurrence déloyale ou du droit d’auteur, les griefs portant sur les conditions de contractualisation et sur l’assistance à l’installation et dans l’exploitation du concept vendu par Alésia minceur.
C’est donc par de justes motifs que les premiers juges ont considéré que le contrat signé était sans ambiguïté un contrat de licence de marque et que le litige relevait bien de l’exécution d’un contrat entre deux commerçants et non de la compétence spécifique du tribunal de grande instance en matière de marques et qu’ils étaient donc bien matériellement compétents pour en connaître. » ;

- CA Douai, 2e ch., 2e sect., 31 mars 2016, Cartospe Packaging SAS c. Cartonnages Vaillant SAS et al., 2015/05645 ; D20160039 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande en concurrence déloyale fondée notamment sur la copie d’emballages) :

« Cette notion - d'”actions civiles et demandes relatives aux dessins et modèles” - doit s'entendre de tout litige qui puiserait ses éléments de solution dans les règles qui répondraient à la finalité spécifique de la protection des dessins et modèles, et donc dans les règles propres à la propriété intellectuelle.
Il résulte de ce qui précède que la juridiction consulaire est incompétente pour connaître d'une action en concurrence déloyale, quand une telle action l'amène à se prononcer sur une question relevant du droit des dessins et modèles communautaires. Tel ne saurait être le cas, lorsque la demande est juridiquement fondée sur des règles extérieures au droit de la propriété intellectuelle, telles celles de la responsabilité contractuelle ou délictuelle, même si cette demande a un lien avec un dessin ou modèle du demandeur ou du défendeur.

[…]
Ainsi, la cour note qu'au visa exclusif de l'article 1382 du Code civil, l'action de la SAS Cartospe tend à voir sanctionner la faute caractérisant le parasitisme et découlant, d'une part, de la reprise de tous les éléments propres aux emballages qu'elle commercialise et ayant fait l'objet d'investissements de sa part, de la reprise de la machine permettant la fabrication des conditionnements, de la reprise de la formation des professionnels, d'autre part, de la tentative d'économie des frais quant aux sachets en plastique, ainsi que le risque de confusion sciemment poursuivi par son concurrent.
Cette action ne saurait être cantonnée à une recherche par la société Cartospe de voir protéger les seuls éléments, couverts par les règles des dessins et modèles, comme le sous-entend la société Cartonnage Vaillant, ce d'autant que pour se prononcer sur le bien-fondé des demandes en concurrence déloyale, il n'est aucunement nécessaire d'apprécier les droits de la société Cartospe sur son dessin et modèle communautaire, tant en terme de validité que de portée.

[…]
Le fait qu’ultérieurement, les défendeurs à l’action entendent soulever une éventuelle contestation quant à la nullité desdits dessins et modèles, est sans influence sur la détermination de la compétence liée à la demande initiale formulée par la société Cartospe. » ;

- TGI Paris, 3e ch., 2e sect., ord. JME, 25 mars 2016, Altim SARL c. Silmach, 2015/06968 ; B20160066 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande d’octroi d’une licence d’exploitation sur des brevets détenus en copropriété:

« Il est cependant constant que les dispositions de l’article L. 615-17 du Code de la propriété intellectuelle, dérogatoires au droit commun, sont d’interprétation stricte, de sorte qu’elles ne doivent recevoir application que pour les litiges mettant en jeu des règles propres aux brevets. Une demande juridiquement fondée sur des règles extérieures au droit des brevets, telles celles de la responsabilité contractuelle ou délictuelle, ne relève ainsi pas de la compétence exclusive du Tribunal de grande instance, même si elle a un lien avec un brevet du demandeur ou du défendeur.
[…]
Cependant, au vu des propres moyens en fait et en droit développés par la société Altim dans son assignation, rappelés ci-dessus, ses demandes apparaissent manifestement exclusivement fondées sur des règles extérieures au droit des brevets, à savoir les règles du droit des contrats, invoquées dans un litige purement commercial, opposant deux sociétés commerciales, consistant à apprécier l’opportunité d’accorder ou non une licence à la société Altim sur les brevets listés en annexe 2 du contrat, problématique dont l’issue dépendra de l’interprétation donnée au contrat et à son annexe 1.
Il n’est pas démontré que lesdites demandes, issues d’un fondement contractuel, nécessiteront la mise en cause des règles propres au droit des brevets et notamment celles relatives à la propriété et à la contrefaçon. » ;

- Cass. com., 16 févr. 2016, Trevillers Cartonnages SAS et al. c. Abzac Gestion SA et al., G/2014/25340 ; B20160022 ; JCP G, 15, 11 avr. 2016, p. 729, note de C. de Haas ; JCP E, 11, 17 mars 2016, 25, note ; Comm. com. électr., avr. 2016, p. 28, note de C. Caron ; D IP/IT, mai 2016, p. 255, note de J. Daleau ; Contr. conc. cons., juin 2016, p. 46, note de M. Malaurie-Vignal ; Gaz Pal, 24, 28 juin 2016, p. 29, note de L. Marino (compétence du T. com. pour statuer sur une demande de mesure d’instruction en vue d’établir l’existence d’actes de concurrence déloyale fondés sur l’imitation d’un fût) :

« Mais attendu que l'arrêt relève que si, dans la requête, les sociétés Abzac font état, à plusieurs reprises, de l'existence d'un brevet portant sur le fût qu'elles produisent, elles n'invoquent que des actes de concurrence déloyale auxquels elles seraient exposées, sans prétendre à la contrefaçon de ce brevet ; que de ces constatations, faisant ressortir que l'action au fond envisagée n'était pas relative à des droits de brevet, la cour d'appel […] a exactement déduit que le président du tribunal de commerce était compétent pour ordonner la mesure d'instruction sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile. » ;

- CA Lyon, 1re ch. civ. A, 28 janv. 2016, Maurice F et al. c. HSC SAS, 2015/06886 ; B20160007 ; PIBD 2016, 1045, III-183 (compétence du TGI de Bourg-en-Bresse, et non du TGI de Paris, pour statuer sur une demande reconventionnelle en paiement fondée sur l’inexécution des obligations découlant d’un contrat de licence de brevet) :

« Mais comme le soutiennent à bon droit Fabienne R et Maurice F, le présent litige ainsi que la demande reconventionnelle qu’ils forment ne portent pas sur le brevet d’invention lui-même mais uniquement sur le contrat de licence conclu avec la société HSC, dont il est question de la rupture. Cette question est totalement indépendante de celle du brevet d’invention.
De ce fait, bien que ce contrat de licence concerne l’exploitation du brevet d’invention, il ne s’agit ici pas d’une action relative à celui-ci et la technique du droit des brevets n’est pas en cause car le brevet n’est pas contesté ou discuté par les parties et aucune conséquence civile attachée directement à celui-ci n’est en jeu. » ;

- CA Paris, pôle 1, 3e ch., 3 nov. 2015, Arobazimmo SARL et al. c. Arobase Immobilier SARL, 2015/07899 ; M20150462 (compétence du T. com. pour statuer sur une demande en concurrence déloyale fondée sur l’imitation de dénomination sociale, nom commercial, enseigne et nom de domaine) :

« Considérant que, par voie de conclusions intitulées d'incompétence, les sociétés Arobazimmo et Arobazimmo Gestion ont exposé que l'utilisation du nom de domaine, du nom commercial, de l'enseigne, de la dénomination sociale Arobazimmo précède chronologiquement le dépôt de la marque Arobase Immobilier et du nom de domaine arobaseimmobilier.fr ; que dans ces conditions l'examen du litige implique pour la juridiction saisie d'examiner l'application du droit des marques, en présence notamment de demandes reconventionnelles sur ce fondement, nonobstant la concurrence déloyale visée par les assignations, notamment du fait de l'existence même de la marque Arobase Immobilier, déposée le 1er décembre 2011, de la nécessité pour la demanderesse de distinguer les faits de concurrence déloyale de ceux d'atteinte à sa marque et de l'existence de droits antérieurs à cette marque ;
Considérant que les demandes reconventionnelles ne pourraient être fondées sur la protection de droits sur une marque dont les sociétés Arobazimmo et Arobazimmo Gestion ne sont pas titulaires ; que la société Arobase Immobilier, certes titulaire de la marque déposée éponyme, ne revendique pas de droits privatifs à ce titre ; que surtout, les antériorités invoquées de part et d'autre sont cantonnées entre noms de domaine, dénominations sociales, nom commercial et enseignes, la société Arobase Immobilier ne les faisant pas remonter à la date du dépôt de sa marque ; que dès lors la solution du litige ne nécessite pas qu'il soit fait application du droit des marques. » ;

  • Décisions ayant retenu la compétence exclusive du tribunal de grande instance spécialement désigné :

- CA Paris, pôle 5, 2e ch., 19 juin 2020, Yusuf P et al. c. Brand Universel SARL, 2019/18802 ; M20200133 (compétence du TGI pour statuer sur une demande en paiement de redevances en exécution d’un contrat de licence de marque et une demande reconventionnelle en nullité de ce contrat) :

« La cour rappelle que si les actions liées à la validité et à l’exécution d’un contrat de licence de marques relèvent en principe de la compétence du tribunal de commerce, il convient cependant de rechercher si la résolution du litige porte sur l’application des dispositions relevant du droit des marques, le tribunal de grande instance ayant une compétence exclusive pour les actions ayant trait à la validité et à la propriété d’une marque.
[…]
En outre, la cour constate que la société Brand, assignée en exécution d’un contrat de licence de marques, oppose la nullité dudit contrat pour défaut d’objet et de cause en arguant d’une part qu’une licence avait déjà été concédée dont l’absence de renouvellement n’a pas été inscrite sur le certificat de l’EUIPO, d’autre part que la marque encourt la déchéance faute d’exploitation pendant une durée de cinq ans, et enfin que Monsieur P est titulaire de droits sur d’autres marques THOMAS MARSHALL en violation de la garantie de jouissance paisible prévue au contrat, de sorte que l’action en paiement en exécution du contrat de licence de marque suppose de statuer sur des questions mettant en cause les règles spécifiques du droit des marques, et que le tribunal de commerce a donc jugé à bon droit que le litige relevait de la compétence du tribunal de grande instance de Paris en application  de l’article L. 716-3  du CPI. » ; 

- CA Aix-en-Provence, 2e ch., 29 nov. 2018, Alfred J et al. c. Jean-Jacques M et al., 2018/09680 ; M20180477 ; Propr. intell., 70, janv. 2019, p. 88, note de C. de Haas (compétence du TGI, et non du T. com., pour statuer sur une demande en contrefaçon de marque et en concurrence déloyale et parasitaire) :

« L'assignation dont s'agit vise à la fois des faits de contrefaçon de la marque THERMO FRANCE et des faits de concurrence déloyale et parasitaire.
Les incidents d'instance visés par l'article 771 deuxième alinéa précité, sont ceux mentionnés par les articles 384 et 385 du Code de procédure civile et n'incluent pas les fins de non-recevoir tels le défaut de qualité et de droit à agir qui ressortent à la compétence du juge du fond qui déterminera si la société la SAS Thermic France peut se prévaloir de droits sur la marque litigieuse.
Trois des parties défenderesses étant domiciliées dans le ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, le tribunal de grande instance de Marseille se trouve ainsi territorialement et matériellement compétent.» ; 

- CA Paris, pôle 5, 1re ch., 15 mai 2018, Luc G c. Stimed SAS, 2017/19249 ; B20180036 ; PIBD 2018, 1098, III-454 (compétence du TGI de Paris, et non du TGI de Chalon-sur-Saône, pour statuer sur une demande d’expertise judiciaire afin d’établir d’éventuels manquements à un contrat de licence de brevet) :

 « Il ressort de l'ordonnance contestée que Monsieur G reprochait à la société Stimed la violation de dispositions contractuelles, notamment la modification de la technique d'assemblage des produits ainsi que l'absence de reproductibilité du son émis par le souffle.
[…]
Si la société Stimed soutient qu’aucune technique d’assemblage n’est brevetée, cette question nécessite de prendre en considération les dispositions des brevets, afin d’apprécier s’ils s’étendent à la technique d’assemblage des dispositifs qu’ils protègent, et si les modifications qui y auraient été apportées sont susceptibles d’affecter le fonctionnement de l’invention.
Par conséquent, Monsieur G est bien fondé à soutenir qu’il convient de faire application des articles L. 615-17 du Code de la propriété intellectuelle et D. 211-6 tel que modifié par le décret n°2009-1205 du 9 octobre 2009, qui établissent la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris pour traiter de cette affaire. » ; 

- CA Versailles, 12e ch., 10 avr. 2018, Ludovic F et al. c. JSMS Diffusion SARL et al., 2017/08592 ; M20180160 ; Propr. intell., 70, janv. 2019, p. 88, note de C. de Haas (compétence du TGI pour statuer sur une demande en concurrence déloyale s’inscrivant dans le cadre d’une contestation d’un contrat de licence de marque) :

«Que le fait que l'action intentée par Ludovic F et la société Panda & Cie à l'encontre de Franck M et de la société JSMS Diffusion devant le tribunal de commerce de Nanterre, si elle ne vise que des actes de concurrence déloyale suppose néanmoins que cette juridiction apprécie l’existence et l’éventuelle portée de ce contrat de licence de marque pour lui permettre de caractériser les actes de concurrence déloyale qui lui sont soumis, de sorte que c’est à bon droit qu’elle a décliné sa compétence au profit du tribunal de grande instance, en application de l’article [L. 716-3 du CPI] » ;

- CA Caen, 1re ch. civ., 11 juil. 2017, Sheipaula Ltd c. La Patrimoniale Chantreau et al., 2015/03510 ; B20170132 ; PIBD 2017, 1080, III-678 (compétence du TGI de Paris, et non du TGI de Coutances, pour statuer sur la régularité d’une cession de quote-part d’un brevet détenu en copropriété) :

«La seule décision rendue en matière de copropriété de brevet [Cass. com, 18 nov. 2008, Arlette A c. Jacques G et al., N/2007/17749 ; B20080155 ; PIBD 2009, 888, III-755] a trait à la cession d'un brevet dont deux personnes physiques était co-titulaires, par une société tiers à la copropriété mais dont le gérant était l'un des deux co-titulaires.
La Cour de cassation a rappelé qu’aux termes de l’article L 613-29 du Code de la propriété intellectuelle, chaque copropriétaire peut, à tout moment, céder sa quote-part, que les copropriétaires disposent d’un droit de préemption pendant un délai de trois mois à compter de la notification du projet de cession mais que la cession d’un brevet indivis ne peut être initiée que par un des copropriétaires et à hauteur de sa seule quote-part, moyennent l’observation d’une procédure précisément décrite.
Il en résulte que la détermination des obligations contractuelles de chacune des parties et leurs éventuels manquements dépendent de la validité et de l’opposabilité des droits de la société La Patrimoniale Chantreau sur le brevet, de la validité de celui-ci et de la validité de la cession intervenue, questions mettant en cause les règles spécifiques du droit des brevets et justifiant de renvoyer la connaissance du présent litige au tribunal de grande instance de Paris. »  

- TGI Paris, 3e ch., 1re sect., ord. JME, 30 mars 2017, ETBB SAS c. Endema Construction SARL et al., 2016/07026 ; M20170198 (compétence du TGI de Paris, et non du TGI de Châteauroux, pour statuer sur une demande pour inexécution du contrat de licence de marque ainsi qu’en concurrence déloyale et parasitaire) :

« Par-delà une certaine confusion dans l’argumentation qui ne permet pas de comprendre à quel titre la contrefaçon est évoquée sans être invoquée et comment elle s’articulerait avec des demandes fondées d’une part sur la responsabilité contractuelle avec laquelle elle est incompatible et d’autre part sur la concurrence déloyale et parasitaire qui est soumise à un régime distinct, il est certain que le litige porte à titre principal sur l’inexécution d’un contrat de licence et est ainsi, au regard de la généralité des termes de l’article L. 716-3 du Code de la propriété intellectuelle et en dépit de l’interprétation stricte que doit susciter une disposition dérogatoire au droit commun, "relatif aux marques" en ce qu’il touche à un mode d’exploitation d’une marque.
Surtout,
[…] l’objet du litige, particulièrement dans un domaine dans lequel la frontière entre l’action en inexécution et l’action en contrefaçon est ténue, est susceptible d’évoluer dans les conditions des articles 4 et 753 du Code de procédure civile tant en demande qu’en défense. Et, l’appréciation de la compétence juridictionnelle sans égard pour ces possibilités d’évolution du litige, quelle que soit la pertinence au fond de ces projections, est de nature à priver a priori le défendeur, tenu de soulever son exception in limine litis conformément à l’article 74 du Code de procédure civile, de la faculté d’opposer utilement à titre de moyen de défense ou de demande reconventionnelle la nullité de la marque objet du contrat de licence dont il n’est pas contestable que l’appréciation relève ici de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris. » ; 

- TGI Paris, 3e ch., 3e sect., ord. JME, 9 déc. 2016, Transparence SARL et al. c. Matthieu L et al., 2016/12425 ; M20160651 (compétence du TGI pour statuer sur des demandes en contrefaçon et transfert de propriété de marque et en concurrence déloyale et parasitaire) :

« Les demandeurs à l'incident soutiennent d'abord que les prétentions de la société TRANSPARENCE trouvent en réalité leur source dans les actes de cession de capital et de garantie d'actif et de passif conclus dans le cadre des différentes opérations.
[…]
Ils font valoir que ces différents actes prévoient sans exception de porter devant le tribunal de commerce l'intégralité des litiges résultant de leur interprétation ou de leur exécution.
Mais même si l’appréciation des droits antérieurs invoqués requiert une analyse du contenu de ces conventions, les demandes présentées par la société Transparence SARL, n’implique pas moins un examen portant sur l’existence de droits de propriété intellectuelle dont notamment celui prévu à l’article L. 712-6
[du CPI], selon lequel un tiers estimant avoir un droit sur une marque déposée peut en revendiquer la propriété si l’enregistrement a été demandé en fraude de ses droits ou en violation d’une obligation légale ou conventionnelle.
[…]
Par ailleurs même si elles émanent d'une autre partie ne se prévalant d'aucun titre de propriété intellectuelle, et sont présentées comme reposant sur des agissements distincts de ceux parallèlement invoqués au titre de la contrefaçon des marques en cause, les demandes formulées sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire se rattachent aux premières par un lien de connexité justifiant également qu'elles soient portées devant cette même juridiction. » ;

- CA Agen, ch. com., 6 juil. 2016, Patrick M c. Resseguet SAS, 2016/00349 ; B20160111 (compétence du TGI de Paris, et non du T. com., pour statuer sur une demande en paiement de redevances liées à un contrat d’exploitation du brevet) :

« Attendu que c’est en vain que Monsieur M soutient que son action est exclusivement fondée sur le droit des obligations et relève donc de la compétence du juge de droit commun, alors que, comme le fait justement valoir la société Resseguet, c’est notamment en raison de ses contestations sur la régularité du brevet dont l’exploitation est l’objet de la convention du 13 février 2013 qu’elle refuse de régler les royalties réclamées par Monsieur M ;
Qu’opposant la nullité du brevet à la demande de ce dernier, celle-ci relève donc bien de la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris. » ;

- CA Paris, pôle 1, 2e ch., 11 juin 2015, Fayat et al. c. Malt Marques à Long Terme SARL, 2015/00911 ; M20150333 (compétence du TGI, et non du T. com., pour statuer sur une demande en responsabilité contractuelle au regard d’une clause de garantie d’éviction mentionnée dans une convention de transfert de propriété intellectuelle) :

« Considérant qu’il résulte de ces constatations que la recherche de la responsabilité de la SAS Marque à Long Terme sur le fondement de l’article 1147 du Code civil suppose l’examen des droits respectifs des parties en application de la "convention de transfert de propriété intellectuelle" et de la cession des droits patrimoniaux d’auteur qu’elle contient et implique, pour appréhender la réalité du préjudice allégué, l’appréciation par la juridiction saisie de l’existence d’une contrefaçon au regard des éléments de fonds apportés sur l’opposition et les refus de protection ;
Considérant qu’il s’ensuit que l’action engagée par les sociétés Fayat, Razel-Bec et Bomag est bien relative aux marques ; que la juridiction saisie ne peut se borner pour statuer sur cette demande en paiement à se référer aux seuls articles 1134 et 1147 du Code civil mais doit se reporter aux textes du Code de la propriété intellectuelle ». 

Sylvie Lepoutre
Rédactrice au PIBD