d’après l’article de Mark J. Thronson1 : Words matter, in IPM, novembre 2019, p. 52-53
L’auteur présente une décision de la Cour d’appel du circuit fédéral (CAFC) qui marque un tournant sur la façon dont la portée de la protection conférée par un brevet de modèle2 doit être interprétée.
Le brevet de modèle au cœur du litige a été déposé par Curver Luxembourg. Il représente un motif constitué d’éléments en forme de Y entrecroisés. Dans la revendication du brevet de modèle, il est question de « modèle ornemental pour un motif pour une chaise ». Le titre du brevet de modèle comporte les termes « motif pour une chaise », alors que n’est représenté que le motif constitué des éléments en forme de Y entrecroisés, sans chaise.
Le défendeur, Home Expressions, commercialise des paniers de rangement qui présentent un motif constitué d’éléments en forme de Y entrecroisés, motif similaire à celui représenté dans le brevet de modèle de Curver Luxembourg. Considérant ces paniers de rangement contrefaisants, Curver Luxembourg a assigné Home Expressions en contrefaçon de son brevet de modèle.
Le demandeur a fait valoir que la portée de la protection de son titre devait être déterminée par les reproductions du modèle qui ne se limitent pas à une chaise puisque seuls sont représentés les éléments en forme de Y entrecroisés. Il estime qu’on ne peut pas se fonder sur le terme « chaise » contenu dans la revendication pour limiter la portée de la protection.
La CAFC a été d’un tout autre avis et a confirmé la décision du tribunal de district de débouter Curver Luxembourg de sa demande. La Cour a en effet jugé que les paniers de rangement de Home Expressions n’étaient pas contrefaisants. Selon elle, la revendication doit être interprétée comme portant sur un modèle ornemental pour un motif de3 chaise et non un motif pour4 une chaise qui pourrait, lui, être appliqué à d’autres articles.
La question de savoir si on doit accorder une quelconque importance au texte des revendications pour délimiter la portée de la protection fait depuis longtemps l’objet de débats. La CAFC semble s’être libérée de la jurisprudence précédente dans ce domaine.
Une des conséquences pratiques de cet arrêt est qu’il sera désormais plus facile d’obtenir et de défendre des brevets de modèle d’une portée large.
Cet arrêt pourrait également rendre les actions en contrefaçon et les procédures d’examen plus complexes dans la mesure où les arguments porteront sur l’interprétation du texte des revendications et non plus seulement sur celle des dessins.
1 Blank Rome.
2Design patent.
3 Souligné par l'auteur.
4 Souligné par l'auteur.