Contrefaçon des marques verbales et semi-figurative (oui) - Reproduction - Site internet - Ancien distributeur agréé - Usage dans la vie des affaires - Usage à titre de marque - Usage à titre décoratif - Préjudice subi - Atteinte à la valeur patrimoniale et au pouvoir distinctif de la marque
Atteinte aux marques verbales de renommée (non) - Portée de la renommée - Droit de l’UE - Modification du comportement économique du consommateur
Concurrence déloyale et parasitaire (oui) - Faits distincts des actes de contrefaçon - Atteinte au nom commercial et à l’enseigne - Volonté de se placer dans le sillage d'autrui - Risque de confusion - Préjudice - Caractère limité des actes incriminés
La présence des signes « Barrisol » sur le site internet et la page Facebook d'un ancien distributeur agréé, ainsi que dans des films promotionnels, postérieurement à la résiliation du contrat de distribution, constitue une contrefaçon des marques verbale et semi-figurative BARRISOL. Celles-ci ont été reproduites à l'identique, pour la promotion de plafonds tendus, soit des produits identiques à ceux visés par les marques. Cet usage a été réalisé dans la vie des affaires et à titre de marque, pour garantir l'origine commerciale des produits présentés. La suppression des photographies et d’une vidéo dès la mise en demeure est sans effet, la bonne foi étant inopérante en matière de contrefaçon. Il ne peut être reproché à la société demanderesse de ne pas avoir pris l'initiative de faire supprimer auprès de l'hébergeur en cause d’autres vidéos présentes sur la chaîne YouTube de la société défenderesse, même si la loi l'y autorise.
Toutefois, aucun élément versé ne permet d’établir la facilité d'accès à ces contenus sur le site internet de la société défenderesse. En outre, l'usage et la présentation des marques incriminées s'inscrivent davantage comme un élément de décor que comme un vecteur de communication. En tout état de cause, les vidéos n’ont fait l'objet que d'un nombre limité de consultations. Ainsi, le préjudice subi par la société demanderesse s'analyse uniquement en une atteinte à la valeur des marques reproduites et à leur pouvoir distinctif.
Il est établi que les marques verbales françaises BARRISOL jouissent d’une renommée sur le territoire national. La visibilité du nom commercial de la société demanderesse, identique à la marque, rejaillit inévitablement sur celle-ci dans l'esprit du public pertinent (professionnels du bâtiment et de la construction), qui procédera par assimilation, en particulier dès que le signe sera utilisé indistinctement pour désigner l'un et l'autre.
L’atteinte à ces marques de renommée n’est pas caractérisée. Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, il appartient notamment au titulaire de démontrer l'existence d'une atteinte effective et actuelle à sa marque de renommée, au sens de l'article 4, § 4, a), de la directive 89/104/CEE ou, à défaut, d'un risque sérieux qu'une telle atteinte se produise dans le futur, ce qui suppose que soit démontrée une modification du comportement économique du consommateur ou un risque sérieux qu'une telle modification se produise dans le futur. En l’espèce, les images litigieuses ont été effacées rapidement par la société défenderesse ou ont fait l'objet d'une exploitation symbolique au regard du très faible nombre de visionnages des vidéos, mises en ligne à une époque où les deux parties étaient en relation. Il n’est justifié d’aucune atteinte effective portée aux marques de renommée. En outre, la société demanderesse ne démontre pas en quoi l'apposition de ces marques comme élément de décor dans quelques vidéos n'ayant été que très peu consultées ait pu induire une modification du comportement économique du consommateur moyen des produits ou services pour lesquels elles sont enregistrées. Il n’est pas davantage démontré un risque sérieux qu'une telle modification se produise dans le futur, d'autant que cet usage a été circonscrit dans le temps.
Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 21 septembre 2021, 18/21394 (M20210212)
Normalu SAS c. Interlignes Déco SARL
(Infirmation partielle TGI Paris, 3e ch., 1re sect., 6 sept. 2018, 17/05551)