Déchéance de la marque pour dégénérescence (non) - Recevabilité de la demande (oui) - Présentation des éléments de preuve - Désignation devenue usuelle (oui) - Preuve - Fait du titulaire (non) - Défense du titre - Mise en demeure
Est rejetée, la demande en déchéance de la marque verbale CITY STADE dès lors qu’il n’est pas suffisamment démontré qu’elle est devenue, du fait de son titulaire, la désignation usuelle dans le commerce des produits et services pour lesquels elle a été enregistrée.
En effet, il incombe au demandeur qui introduit la demande en déchéance pour dégénérescence de prouver que la marque est devenue la désignation usuelle dans le commerce des produits ou services par le fait de l’activité ou de l’inactivité du titulaire, ces deux conditions étant cumulatives[1].
De nombreux éléments de preuve produits par le demandeur démontrent que l’utilisation du signe « City Stade » est devenue usuelle, en France, au cours de la période pertinente comprise entre la date de publication de l’enregistrement de la marque litigieuse et la date de la demande en déchéance. En effet, le signe contesté a été utilisé seul pour désigner un terrain multisports, sans indication que ce signe provenait d’une source particulière ou faisait l’objet de droits de propriété, tant par des consommateurs de terrains multisports (collectivités territoriales) et les professionnels de ce secteur, que dans des publications destinées à informer les destinataires finaux de tels produits (grand public). Il est fréquemment utilisé par le public pertinent sous une forme générique, au singulier ou au pluriel, précédé des différents articles de la langue française (un, le, des, son, du, des, votre) pour désigner un terrain multisports. La marque contestée est donc devenue la désignation usuelle dans le commerce, sur le marché français du produit couvert par le libellé « Structure complète en acier habillé bois ou métal permettant la pratique de différents sports, (tennis) basket, football) » de la marque contestée.
En revanche, il n’est pas établi que la marque CITY STADE soit devenue usuelle dans le commerce des produits pour lesquels elle est enregistrée du fait de son titulaire. Le fait d’avoir déposé différentes marques City Stade en France et à l’international ou encore d’avoir diversifié les produits proposés ne saurait être considéré comme des actions destinées à empêcher les tiers d’utiliser l’expression de façon générique pour des terrains multisports. Toutefois, il ressort des pièces transmises par le demandeur que le signe « City Stade » est soit suivi du symbole ® destiné à indiquer qu’il s’agit bien d’une marque[2], soit utilisé sous des formes qui ne peuvent être qualifiées de générique comme « City Stade 2020 » désignant un produit commercialisé sous la marque City Stade dans sa version 2020. En effet, l’usage systématique, par le titulaire de la marque contestée, du symbole ® utilisé après l’expression « City Stade », dans sa documentation publicitaire destinée aux consommateurs, lors de salons et sur son site internet accessible à tout public, indique qu’il s’agit d’une marque destinée à déterminer l’origine commerciale des produits et non d’une expression générique. Enfin, il est établi qu’il a adressé, antérieurement à la demande en déchéance, des lettres de mise en demeure à des concurrents afin qu’ils cessent d’identifier leurs produits avec le signe contesté.
Ainsi, les différentes démarches effectuées par le titulaire de la marque contestée à titre préventif et curatif visant à défendre sa marque pour la période de référence ont conduit l’INPI à considérer qu’il n’avait pas été suffisamment démontré que la marque contestée était devenue usuelle dans le commerce pour les produits pour lesquels elle est enregistrée du fait de son titulaire. La demande en déchéance est donc rejetée.
Décision INPI, 24 février 2022, DC21-0032 (DC20210032)
Sports Et Loisirs SAS c. Tennis d'Aquitaine SAS
[1] CA Bordeaux, 1re ch. civ., 24 septembre 2019, 17/05270, M20190240 ; Sur l’appréciation de l’activité ou de l’inactivité du titulaire, voir CJUE, 3e ch., 6 juin 2014, C-409/12, point 32.
[2] CA Paris, pôle 5, 2e ch., 12 juin 2015, 14/11690 ; M20150310 ; PIBD 2015, 1036, III-672.