Doctrine et analyses
Comptes rendus

Accords de libre-échange - Royaume-Uni et accord transpacifique

PIBD 1160-II-1

d’après l’article de Yohan Liyanage* et Stephanie Farrington* : Free trade agreements, in IPM, avril 2021, p. 17-18

Texte

Suite à sa sortie de l’Union européenne, le Royaume-Uni est désormais libre de conclure des accords de libre-échange avec qui bon lui semble. Le 1er février 2021, il déposait une demande officielle d’adhésion à l’accord de partenariat transpacifique global et progressiste1 (ci-après dénommé « l’accord transpacifique »). Cet accord comportant un volet sur la propriété intellectuelle, les auteurs passent en revue les dispositions susceptibles d’être incompatibles avec le droit britannique actuel.

Les parties à l’accord transpacifique doivent adopter un délai de grâce de douze mois pour déposer une demande de brevet après la divulgation de l’invention. Or, la Convention sur le brevet européen (CBE) ne prévoit pas de délai de grâce, si ce n’est un délai de six mois limité à certains cas. L’adoption d’une telle disposition serait donc contraire à la CBE. Le Royaume-Uni pourrait adopter un délai de grâce de douze mois pour les brevets britanniques et non pour les brevets européens désignant le Royaume-Uni mais cela risquerait de rendre le régime peu attractif. Les Britanniques pourraient également faire valoir que la CBE n’interdit pas un délai de grâce plus généreux.

L’accord transpacifique impose également la mise en place d’un mécanisme établissant un lien entre l’autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments génériques et la protection par brevet (patent linkage). Ce mécanisme prévoit un système de notification de la demande d’AMM à l’adresse du titulaire du brevet ainsi que des procédures et du temps pour permettre de résoudre d’éventuels litiges relatifs à la validité ou à la contrefaçon du brevet. Selon les auteurs, l’organisation judiciaire britannique concernant la résolution de tels litiges remplit certaines des exigences de l’accord transpacifique. En revanche, le Royaume-Uni ne dispose pas d’un système de notification au titulaire des brevets. Les auteurs avancent que la rédaction de l’accord transpacifique est suffisamment large sur ce point et que le Royaume-Uni pourrait toujours faire valoir que le fabricant de génériques peut volontairement notifier sa demande au titulaire. Cela sera-t-il suffisant pour être en conformité avec l’accord transpacifique ? L’absence d’un système de notification n’est-il pas déploré par l’industrie pharmaceutique ? Légiférer en ce sens pourrait changer la donne, estiment les auteurs.

Pour ce qui concerne les marques, les dispositions de l’accord transpacifique n’auront que peu d’incidences sur le régime britannique. Il en va tout autrement des indications géographiques (IG). L’accord prévoit en effet une protection des indications géographiques soit par le droit des marques, soit par un droit sui generis, notamment. En ce qui concerne l’interaction entre marques et indications géographiques, l’accord transpacifique applique le principe du « premier arrivé, premier servi ». Une demande d’IG peut donc être refusée ou une IG peut être annulée en cas de risque de confusion avec une marque antérieure. Le Royaume-Uni applique quant à lui un droit sui generis avec un système de coexistence entre marques et IG qui est plus favorable aux IG qu’aux marques. Une demande d’IG n’est refusée que dans des cas restreints, même si elle est en conflit avec une marque antérieure.

Par ailleurs, les auteurs examinent la compatibilité du droit britannique vis-à-vis des dispositions de l’accord transpacifique relatives au droit d’auteur et aux droits voisins et aux dommages-intérêts alloués en cas de contrefaçon de marque ou de droit d’auteur.

* Linklaters, Londres.
1 Accord de libre-échange entre l’Australie, Brunei, le Canada, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le Vietnam.