Doctrine et analyses
Compte rendu

Chine : un arrêt de la Cour suprême populaire met en évidence les pièges des accords de report d’entrée en matière de brevets

PIBD 1178-II-1

d’après l’article d’Adam Houldsworth : Supreme People’s Court decision highlights Chinese pay-for-delay patent settlement pitfalls, in IAM, 14 février 2022

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La Cour suprême chinoise apporte quelques éclaircissements sur la façon dont les tribunaux doivent appréhender les accords amiables conclus pour mettre un terme à un litige brevet portant sur des médicaments lorsque ces accords semblent être conclus pour retarder l’entrée sur le marché d’un médicament générique.

En 2019, le titulaire du brevet litigieux, AstraZeneca, engage une action en contrefaçon contre Jiangsu Osaikang Pharmaceuticals qui commercialise une version générique du produit breveté. Le brevet d’AstraZeneca doit expirer en mars 2021.

Déposé à l’origine par Bristol Myers Squibb, ce brevet avait été cédé à AstraZeneca en 2014. De son côté, Osaikang avait conclu un accord de partenariat avec Vcare Company relatif à son produit. Suite à un litige entre Bristol Myers Squibb et Vcare, des accords avait été conclus en 2011 et 2012 aux termes desquels le brevet ne devait pas être opposé à Vcare et ses affiliés avant 2016. En contrepartie, Vcare et ses affiliés acceptaient de retirer leur demande de nullité du brevet.

Suite à l’action en contrefaçon engagée par AstraZeneca contre Osaikang, Vcare a engagé une action contre Bristol Myers Squibb et AstraZeneca pour rupture de contrat. De plus, Osaikang a fait valoir qu’aux termes du contrat, ses activités ne constituaient pas une contrefaçon du brevet d’AstraZeneca. En première instance, AstraZeneca a été débouté de sa demande en contrefaçon. Durant la phase d’appel, il a demandé le retrait de son action en contrefaçon suite à l’accord conclu avec Osaikang selon lequel le défendeur retirait son action pour rupture de contrat.

La Cour suprême explique qu’en présence d’un accord entre le titulaire d’un brevet sur un médicament et un génériqueur, si l’accord a l’apparence d’un accord de report d’entrée, le tribunal doit examiner si l’accord en question viole la loi anti-monopole. Si cet examen révèle des agissements anti-concurrentiels, le tribunal peut décider d’empêcher le retrait de la demande en justice et porter l’affaire devant l’autorité de la concurrence. Plus précisément, si l’accord confère un avantage direct ou indirect au génériqueur en échange du retrait de sa demande en nullité, le tribunal doit examiner si cela a pour effet de restreindre la concurrence et se demander ce qui se serait passé en l’absence d’accord.

Le point crucial est d’évaluer les chances du brevet d’être déclaré nul si l’action s’était poursuivie. Le tribunal peut raisonnablement conclure qu’un versement important d’argent au génériqueur est la preuve que l’action en nullité avait des chances de réussir. Si le brevet a de fortes chances d’être déclaré nul et que l’accord porte atteinte à la concurrence en allongeant la durée du monopole, l’accord peut être considéré comme ayant violé la loi anti-monopole.

Dans le cas présent, il n’a pas été jugé qu’AstraZeneca avait violé la loi anti-monopole parce que son brevet a expiré en 2021 et qu’il n’a pas été prouvé que la demande de nullité de 2012 aurait été couronnée de succès.

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