Jurisprudence
Brevets

Compétence du magistrat saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance de saisie-contrefaçon - Mise sous séquestre provisoire des pièces saisies pour assurer la protection du secret des affaires

PIBD 1199-III-1
Cass. com., 1er février 2023

Demande de rétractation de l’ordonnance autorisant la saisie-contrefaçon - Compétence du juge ayant rendu l’ordonnance - Requête afférente à une instance en cours - Exception d’incompétence - Recevabilité - Demande nouvelle devant la Cour de cassation

Rétractation de l'ordonnance autorisant la saisie-contrefaçon - Secret des affaires - Placement sous séquestre provisoire des pièces saisies - Placement sous scellés

Texte

Il résulte de l'article 845, al. 3, du Code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333, que les requêtes afférentes à une instance en cours relèvent de la seule compétence du président de la chambre saisie ou à laquelle l'affaire a été distribuée ou au juge déjà saisi. Selon l'article 74 du même code, les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

Selon la cour d’appel, la société demanderesse à la rétractation de l’ordonnance de saisie-contrefaçon a soulevé, dans ses conclusions, une fin de non-recevoir, tirée du défaut de pouvoir du président de la chambre à laquelle l'affaire avait été distribuée, avant de développer une défense au fond.

Cette société n’était pas recevable à soulever pour la première fois devant la Cour de cassation, sous le couvert d'une violation de l'article 845, al. 3, du Code de procédure civile, l'incompétence de ce magistrat.

En vertu de l'article R. 615-2, dernier alinéa, du CPI, afin d'assurer la protection du secret des affaires, le président, qui autorise une mesure de saisie-contrefaçon, peut ordonner d'office le placement sous séquestre provisoire des pièces saisies[1], dans les conditions prévues à l'article R. 153-1 du Code de commerce.

La cour d’appel a rejeté la demande de rétractation des ordonnances qui avaient autorisé la saisie réelle ou par voie de photocopie ou de photographie de documents « sous réserve de placement sous scellés en cas d'atteinte au secret des affaires ». Elle a d’abord considéré que la procédure spécifique de placement sous séquestre provisoire était facultative. Elle a ensuite relevé que le magistrat avait fait le choix de ne pas y recourir, et de prononcer la mesure, différente et plus protectrice du saisi, de placement sous scellés des pièces de nature à violer le secret des affaires.

En statuant ainsi, alors qu’afin d’assurer la protection du secret des affaires, le président, statuant sur une demande de saisie-contrefaçon, ne pouvait que recourir, au besoin d'office, à la procédure spéciale de placement sous séquestre provisoire, la cour d'appel a violé les articles précités.

Cour de cassation, ch. com., 1er février 2023, 21-22.225 (B20230006 ; Dalloz actualité, 22 févr. 2023, note de M. Barba)
Laboratoires Vivacy SAS c. Teoxane SA
(Cassation partielle sans renvoi CA Paris, pôle 5, 2e ch., 25 juin 2021, 20/09994 ; B20210049 ; Rétractation partielle des ordonnances autorisant la saisie-contrefaçon)

[1] La mesure de placement sous séquestre provisoire a été établie par le Décret n° 2018-1126 du 11 décembre 2018 relatif à la protection du secret des affaires pris pour l'application de la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires.