Protection des modèles au titre du droit d'auteur (non) - Originalité - Combinaison d'éléments connus - Matière - Couleur - Style connu - Tendance de la mode - Effort de création - Empreinte de la personnalité de l'auteur
Concurrence déloyale et parasitaire (non) - Imitation du produit - Risque de confusion - Faits distincts - Effet de gamme - Détournement de clientèle
Responsabilité (non) - Contrat d’agent commercial - Rupture des relations commerciales - Manquement à l’obligation de non-concurrence
Les modèles invoqués de bracelets tressés de fines chaînes d’argent et de fils de soie déclinés en différentes couleurs ou tissés à partir d’une chaîne en argent massif à maillons diamantés ne sont pas protégeables au titre du droit d’auteur, faute d’originalité.
Si la notion d'antériorité est indifférente en droit d'auteur, l'originalité doit être appréciée au regard d'œuvres déjà connues afin de déterminer si la création revendiquée s'en dégage d'une manière suffisamment nette et significative, et si ces différences résultent d'un effort de création, marquant l'œuvre revendiquée de l'empreinte de la personnalité de son auteur.
Les bracelets invoqués évoquent fortement les bracelets dits « brésiliens », traditionnellement fabriqués en Amérique latine, confectionnés à partir de fils de coton plus ou moins nombreux, tressés ou tissés, pouvant être agrémentés de perles et arborer divers motifs. S’ils se différencient de ces derniers en ce qu'ils sont réalisés dans des matières plus nobles (argent, soie...) et dans des couleurs plus chics (doré, noir, argenté...) ou féminines (rose, nude), le simple choix de matériaux et de couleurs pour « revisiter » un genre ne peut suffire à leur conférer l'empreinte de la personnalité de leur auteur.
Par ailleurs, des documents produits en défense établissent que plusieurs créateurs ont réalisé des bijoux dans un style proche de ceux invoqués, à des dates très rapprochées, ce qui révèle une inspiration mutuelle entre créateurs et accrédite la thèse selon laquelle les bijoux revendiqués appartiennent à une même tendance « bohème chic » et à un fonds commun de l'accessoire de mode.
La demande en concurrence déloyale est rejetée. Il existe des différences visuelles entre les bracelets en litige, ceux de la demanderesse laissant apparaître des rangées, que l'on ne retrouve pas sur les bijoux litigieux qui présentent plutôt un aspect cotte de mailles uniforme. Les fermetures par liens coulissants sont en outre généralement plus épaisses sur les bijoux invoqués. La proximité des couleurs n'est pas probante, s'agissant de couleurs banales pour des bijoux (doré, argenté, bronze) et les matériaux ne sont pas les mêmes, la demanderesse recourant à des matières précieuses ce qui induit des prix très éloignés. Compte tenu de ces éléments, et du fait que les bijoux en litige s'inscrivent dans un même fonds commun, il n'est pas démontré que les ressemblances, indiscutables, trouvent leur origine dans une volonté fautive de la créatrice poursuivie de chercher à créer un risque de confusion entre ses bijoux et ceux de la demanderesse, dont la notoriété n’est pas démontrée.
Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 15 février 2022, 19/12641 (D20220017)
Marie-Laure C et EURL Du Jeu de Boules c. Valérie B et Delphine L
(Confirmation TGI Paris, 18 avr. 2019, 17/14651)