d’après l’article de Ben Wodecki : The Patent snatcher, in IPM, février 2020, p. 30
Le président des États-Unis peut-il procéder à la confiscation de brevets sur des médicaments dont le prix n’est pas conforme aux exigences du gouvernement ? Ben Wodecki s’interroge.
À l’occasion d’un meeting électoral, Kamala Harris, sénatrice et alors candidate à l’investiture démocrate pour l'élection présidentielle, avait déclaré qu’elle confisquerait les brevets des laboratoires pharmaceutiques qui ne respecteraient pas sa politique en matière de prix des médicaments. Son projet consistait à forcer les laboratoires à appliquer un prix en fonction des tarifs pratiqués à l’étranger pour certains médicaments et à saisir les brevets de ceux qui n’obtempéreraient pas. Bien que Mme Harris ne soit plus dans la course, ce projet ou des projets similaires pourraient être repris par d’autres candidats.
Interrogé, un expert évoque le rôle de punching-ball joué par l’industrie pharmaceutique pour les candidats à la présidence et renvoie à diverses propositions.
L’une d’elles est la proposition de loi coparrainée par le sénateur Cory Booker, Kamala Harris et Bernie Sanders (S. 3166) visant à la création d’une nouvelle agence gouvernementale chargée de fixer le prix de certains médicaments afin d’en faciliter l’accès. Le texte prévoit la levée du monopole des laboratoires récalcitrants.
Par ailleurs, Elizabeth Warren et Bernie Sanders ont évoqué la possibilité pour le gouvernement fédéral d’exercer son droit d’intervention. De son côté, Andrew Yang a proposé des licences obligatoires sur les brevets dont les titulaires ne parviendraient pas à conclure un accord avec le gouvernement sur des prix de médicaments alignés sur ceux pratiqués à l’étranger.
Les Démocrates ne sont pas les seuls à viser l’industrie pharmaceutique. Le président Trump lui-même a exprimé son soutien à d’autres propositions visant à faire baisser le prix des médicaments.
L’expert explique néanmoins que de telles mesures ne pourraient être prises sans légiférer. La question de la constitutionnalité d’une telle loi se poserait alors. Il renvoie à la clause des expropriations du cinquième amendement de la Constitution qui impose une juste compensation en cas de réquisition d’une propriété privée par le gouvernement pour un usage public. L’expert se demande si cette clause, qui s’applique surtout aux expropriations en cas de construction de routes ou de bases militaires, pourrait être invoquée pour un brevet. Il serait intéressant, poursuit-il, de voir comment cela pourrait se faire et quels arguments seraient avancés par le gouvernement.
Et l’auteur de conclure : le 46e président des États-Unis aura-t-il le cœur à modifier la Constitution pour faciliter l’accès aux médicaments ?