Doctrine et analyses
Comptes rendus

Prise sous les tirs croisés

PIBD 1172-II-1
États-Unis : action en contrefaçon de marque contre une influenceuse

d’après l’article de Matthew L. Seror* et Michael Worth* : Caught in the crossfire, in IPM, novembre 2021, p. 48-49

Texte

Peut-on agir en contrefaçon de marque contre une influenceuse qui fait la promotion de produits présumés contrefaisants sur son blog ? Un tribunal californien juge que oui.

Petunia Products est titulaire de la marque BROW1 BOOST sous laquelle il commercialise le mascara pour sourcils « Billion Dollar Brows ». Estimant sa marque contrefaite, Petunia lance une action en contrefaçon contre un fabricant de cosmétiques concurrent qui utilise le hashtag #BROWBOOST sur les réseaux sociaux pour promouvoir ses produits. L’originalité de cette action réside dans le fait que Petunia lance également une action en justice contre la mannequin et influenceuse Molly Sims qui fait la promotion des produits présumés contrefaisants sur son blog.

M. Sims est accusée de contrefaçon directe et indirecte de marque, de publicité mensongère et trompeuse et de pratiques commerciales déloyales. Elle dépose une motion de rejet2 pour tous ces griefs. Les auteurs ne traitent ici que de la contrefaçon directe pour laquelle la motion a été rejetée par le tribunal de district.

Pour démontrer la contrefaçon, le demandeur doit prouver que le défendeur utilise la marque dans le commerce et que cet usage crée un risque de confusion. Il y a usage dans le commerce lorsque le défendeur utilise la marque dans le cadre de « la vente, la distribution ou la promotion des produits ou services ». Les auteurs recensent les différents types de collaboration entre les titulaires de marques et les influenceurs afin de déterminer s’il y a ou non usage dans le commerce. Ils reconnaissent que la notion d’usage dans le commerce telle qu’on l’interprète n’est peut-être plus en phase avec le rôle que jouent désormais les réseaux sociaux dans la promotion des produits et services. Le tribunal a fini par considérer que le post de M. Sims était une publicité rémunérée et qu’il y avait donc bien usage dans le commerce.

Concernant le risque de confusion, le tribunal a relevé que les produits étaient en concurrence directe l’un avec l’autre et qu’ils utilisaient tous les deux les termes brow et boost. L'influenceuse a essayé de faire valoir qu’il ne pouvait y avoir risque de confusion puisqu’elle avait clairement cité le concurrent comme étant le fabricant du mascara et qu’elle n’avait fait aucune mention de Petunia, ni de ses produits. Le tribunal a rejeté cet argument et a considéré que le consommateur pouvait penser qu’il y avait un lien entre Petunia et les produits concurrents présentés sur le blog.

* Buchalter.
1 Sourcil en anglais.
2
« 231 - Motions et exceptions. [...] Un défendeur pourrait faire valoir que, même si le plaignant parvenait à prouver tous les faits avancés, sa requête devrait néanmoins être rejetée sur le fond et de plein droit. L’on dit que le défendeur introduit une motion de demur par laquelle il demande au tribunal de repousser la prétention de son opposant sans qu’il soit nécessaire de produire de preuve. Dans certaines juridictions cette motion est connue sous le titre de motion to dismiss, ou motion de rejet par faute de faire valoir un droit à réparation, ou celui d’exception of no cause or right of action, équivalent à une exception pour défaut de base légale. Si la motion ou l’exception soulevée par le défendeur est jugée recevable, le demandeur pourra être autorisé à modifier ou amender sa plainte. Si le tribunal statuait contre le défendeur, ce dernier devrait alors répondre au fond dans un délai spécifique. » in Droit des États-Unis, 2e édition, Alain A. Levasseur, Précis Dalloz, p. 105-106.

Texte
Les opinions exprimées dans les articles cités n’engagent que leurs auteurs et ne représentent pas la position de l’INPI.