Jurisprudence
Marques

Responsabilité de l'entrepositaire de marchandises contrefaisantes

PIBD 1138-III-2
CJUE, 2 avril 2020

Contrefaçon de marque - Stockage des produits contrefaisants pour le compte d'autrui - Usage de la marque - Détention des produits - Connaissance de cause - Droit de l'UE

Texte

Une personne qui entrepose pour un tiers des produits portant atteinte à un droit de marque sans avoir connaissance de cette atteinte doit être considérée comme ne détenant pas ces produits aux fins de leur offre ou de leur mise dans le commerce au sens des dispositions de l’article 9, § 2, b) du règlement (CE) no 207/2009 et de l’article 9, § 3, b) du règlement (UE) 2017/1001, si cette personne ne poursuit pas elle-même ces finalités.

Dans l’affaire ayant donné lieu à la question préjudicielle, la société qui exploitait une plate-forme de marché en ligne offrait à des tiers la possibilité de publier des offres de vente de leurs produits sur son site internet. Elle leur proposait également de participer à un programme dans le cadre duquel les produits étaient stockés dans un entrepôt par une société de son groupe. Ces sociétés ne faisaient ainsi qu’entreposer les produits revêtus de la marque en cause sur laquelle le demandeur invoquait des droits, sans intention de les offrir à la vente ou de les mettre dans le commerce. L’entreposage de ces produits ne peut être considéré comme un usage de la marque au sens de l’article 9, § 1 du règlement (CE) no 207/2009 et de l’article 9, § 1 et 2 du règlement (UE) 2017/1001. Il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice que l’expression « faire usage » implique un comportement actif et une maîtrise, directe ou indirecte, de l’acte constituant l’usage. Selon les arrêts Google, l’usage d’un signe litigieux par un tiers implique, à tout le moins, que ce dernier en fasse une utilisation dans le cadre de sa propre communication commerciale et le fait de créer les conditions techniques nécessaires pour l’usage d’un signe et d’être rémunéré pour ce service ne signifie pas que celui qui rend ce service fasse lui-même un usage du signe.

Par ailleurs, pour que l’entreposage des produits litigieux puisse être qualifié d’« usage », il faudrait que l’opérateur économique effectuant cet entreposage poursuive lui-même la finalité visée par l’article 9, § 2, b) du règlement (CE) no 207/2009 - dont les dispositions ont été reprises par l’article 9, § 3, b) du règlement (UE) 2017/1001 -, qui consiste en l’offre de produits ou en leur mise dans le commerce. À défaut, il ne saurait être considéré que l’acte constituant l’usage de la marque est le fait de cette personne, ni que le signe soit utilisé dans le cadre de sa propre communication commerciale.

Cour de justice de l'Union européenne, 5e ch., 2 avril 2020, C-567/18 (M20200085)
Coty Germany GmbH c. Amazon Services Europe SARL, Amazon Europe Core SARL, Amazon FC Graben GmbH et al.
(Décision préjudicielle)