Jurisprudence
Brevets

Responsabilité du mandataire pour une erreur sur l’identité du concédant commise dans la rédaction d'un contrat de licence

PIBD 1167-III-2
CA Lyon, 4 mai 2021

Action en responsabilité contractuelle - Recevabilité (oui) - Prescription - Point de départ du délai - Connaissance des faits litigieux - Dommage résultant d’une condamnation judiciaire

Responsabilité contractuelle du mandataire (oui) - Dépôt d’un brevet - Rédaction d’un contrat de licence - Annulation du contrat - Erreur matérielle sur la personne du concédant - Faute du mandant - Partage de responsabilité

Texte

En qualité de rédacteur d'un contrat de licence exclusive d'exploitation d'un brevet, le cabinet qui propose des services de conseil juridique et de rédaction d'actes sous seing privé en matière de propriété industrielle engage sa responsabilité contractuelle en cas de faute.

Une faute a bien été commise dans le fait de rédiger un contrat au nom d'une EURL qui n'avait aucune existence légale. Il appartenait au cabinet, qui a eu également pour mission de déposer le brevet, de solliciter un extrait K bis afin de s'assurer de l'identité du concédant et, si besoin, de rectifier la demande de brevet qui était entachée d'une erreur matérielle concernant la personne du déposant.

La lecture attentive de la convention de licence aurait dû attirer l’attention du concédant lui-même sur le fait qu'il n'exerçait pas son activité sous la forme d'une EURL, mais à son compte en tant que personne physique. Même s’il n’est pas juriste, il ne pouvait ignorer ne pas avoir effectué les démarches nécessaires à la création d'une telle société. Dès lors, les fautes respectives des parties conduisent à un partage de responsabilité à hauteur de 70% à la charge du cabinet et de 30 % à sa charge.

Le cabinet est donc condamné, à cette hauteur, à payer la redevance qui aurait été due si le contrat de licence n’avait pas été annulé par un tribunal en raison de l'erreur commise. En revanche, s’agissant des dommages-intérêts que le concédant a été condamné à verser au licencié pour tromperie sur son identité, la preuve d’un lien de causalité entre la faute reprochée au cabinet et le préjudice n’est pas rapportée.

Cour d'appel de Lyon, 1re ch. civ. B, 4 mai 2021,19/07122 (B20210031)[1]
Jean-Christian C c. X
(Infirmation TGI Saint-Etienne, 17 sept. 2019, 18/01530)

[1] Les relations entre le déposant ou titulaire d'un brevet et son mandataire ont récemment donné lieu à un autre litige. Cette fois-ci, c’est un cabinet de conseils en propriété industrielle qui a fait assigner son client afin d’obtenir le paiement des prestations effectuées pour le maintien en vigueur de plusieurs brevets. Il a obtenu gain de cause. Les juges ont estimé que le cabinet avait bien rempli son obligation de diligence en suivant les instructions du breveté et en transmettant sans délai les ordres de paiement des annuités à son sous-traitant, en dépit d’une rétractation du breveté, jugée tardive (CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 27 mai 2021, Christian B c. SARL Regimbeau, 18/02047 ; B20210039).