Jurisprudence
Brevets

Caractère abusif d'une procédure en contrefaçon de brevets

PIBD 1158-III-1
Cass. com., 3 mars 2021

Action en contrefaçon de brevets - Procédure abusive - Expertise sur la contrefaçon interrompue du fait du demandeur - Rejet partiel de la demande reconventionnelle en nullité des brevets

Texte

Selon l'article 1382, devenu 1240, du Code civil, celui qui triomphe, même partiellement, en son action ne peut être condamné à des dommages-intérêts pour abus du droit d'agir en justice, sauf circonstances particulières.

La société demanderesse a été déboutée de ses demandes en contrefaçon de brevets, la mesure d'expertise ordonnée en première instance afin d'établir les faits de contrefaçon allégués n'ayant pu être menée à son terme, faute de versement d'une consignation complémentaire. La cour d'appel a retenu qu'elle avait commis un abus de son droit d'ester en justice en faisant procéder à des saisies-contrefaçon et à des procès-verbaux de constat dans les salons professionnels où la société défenderesse exposait ses produits, ainsi qu'à son siège social, et en saisissant le tribunal d'une demande en contrefaçon de brevets qu'elle aurait abandonnée, après avoir appris que cette société était placée en liquidation judiciaire, en ne versant pas la consignation due. Elle a estimé que si la société demanderesse était en droit de faire respecter le monopole qu'elle détenait du fait de ses brevets, elle ne pouvait, par le biais de la procédure en contrefaçon, éliminer les nouveaux concurrents qui arrivaient sur le marché très étroit et pointu des appareils antibruit.

En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé. La société demanderesse était en effet en droit d'agir en contrefaçon pour assurer la protection des trois brevets invoqués contre toute atteinte présumée, un premier jugement, confirmé en appel1, ayant rejeté les demandes reconventionnelles en annulation des revendications de ces brevets, à l'exception de la revendication 1 de l'un d'entre eux.

Cour de cassation, ch. com., 3 mars 2021, B 18-15.207 (B20210017)
Technofirst SA, JFAJ SELAS (en la personne de Me Johanna F, en qualité d'administrateur judiciaire de la Sté Technofirst) et Me Simon L (en qualité de mandataire
judiciaire au redressement judiciaire de la Sté Technofirst) c. Alfacoustic SA et Me Christine D (en qualité de liquidateur judiciaire de la Sté Quietys)
(Cassation partielle CA Paris, pôle 5, 1re ch., 28 nov. 2017, 15/23654 ; B20170182 ; Propr. intell., 67, avr. 2018, p. 102, note de C. Derambure)

1 CA Paris, pôle 5, 1re ch., 28 nov. 2017, Alfacoustic SA (anciennement dénommée Technipoles) c. Technofirst SA et Me Christine D (en qualité de liquidateur judiciaire de la Sté Quietys), 13/11327 (B20170180).