Validité de la marque tridimensionnelle (oui) - Forme du conditionnement - Combinaison d'éléments - Désignation nécessaire ou générique - Forme présentant exclusivement un caractère technique ou pratique
Validité des marques tridimensionnelles (oui) - Caractère distinctif - Association de la forme du conditionnement à des pastilles de forme ovoïde - Forme imposée par la nature ou la fonction du produit
Contrefaçon des marques tridimensionnelles (oui) - Identité des produits - Imitation - Similitude visuelle - Impression d'ensemble - Couleur - Risque de confusion ou d'association - Marque notoire - Salon professionnel - Usage à titre de marque
Contrefaçon de la marque verbale (oui) - Imitation - Combinaison de mots - Structure identique - Substitution de lettres - Adjonction d’une lettre finale, d’un graphisme et de couleur - Similitude visuelle et phonétique - Risque de confusion ou d'association - Salon professionnel - Usage à titre de marque
Concurrence déloyale (oui) - Actes de contrefaçon constituant des actes de concurrence déloyale à l'égard du distributeur - Risque de confusion - Détournement de clientèle - Salon professionnel - Actes incriminés commis sur le territoire français
Parasitisme (oui) - Imitation du produit et du conditionnement - Volonté de profiter des investissements et de la notoriété d'autrui - Notoriété du produit
La marque tridimensionnelle constituée de la représentation en noir et blanc d’une boîte transparente, de forme rectangle parallélépipédique, ayant un côté de petite largeur, dont les parois sont légèrement biseautées en leurs angles, dont la face supérieure est constituée d'une pièce encastrée peu visible s'étendant sur l'intégralité de cette surface et recouverte d'un bandeau couvrant de part et d'autre la partie supérieure des faces les plus larges de la boîte est valable[1].
Si la boîte telle que déposée fait apparaître une pièce encastrée, le système d'ouverture ou de fermeture de la boîte représentée n'est pas apparent et cette pièce ne fait apparaître aucun résultat technique ou fonctionnel d'ouverture ou de fermeture. Il importe peu à cet égard que les sociétés demanderesses aient pu affirmer dans leur assignation que les boîtes arguées de contrefaçon présentent un « encastrement à clapet » à l'instar de la marque opposée ou qu'elles aient communiqué sur l'ouverture d'une boîte de bonbons TIC TAC dans leur publicité, l’appréciation de la validité de la marque devant s'effectuer seulement à partir de la représentation figurant au dépôt.
Il n'est pas démontré qu'à la date du dépôt, le signe correspondait « exclusivement » à la désignation nécessaire ou générique des produits de confiserie visés à l'enregistrement ou même qu'il présentait un caractère usuel et banal pour ces produits. Si le conditionnement représenté est destiné à recevoir des confiseries et à être placé dans une poche, la forme adoptée n'est pas pour autant imposée exclusivement par la fonction ou la destination du produit. Les caractéristiques géométriques essentielles du signe telles qu'elles ressortent du dépôt (la forme, la transparence, le bandeau couvrant la partie supérieure des faces plus larges de la boîte) ne résultent pas exclusivement du résultat technique recherché (contenir des bonbons, être suffisamment petit et manipulable), dès lors que le système de fermeture de la boîte n'est pas visible.
Les marques tridimensionnelles dont la forme associe la boîte précitée munie d’une pièce encastrée de couleur blanche à de petits bonbons ovales blancs ou de couleurs orange et verte qu’elle contient sont distinctives. Le brevet versé en défense, antérieur à la marque, porte sur une boîte très proche de celle constituant les marques mais ne montre pas la boîte emplie de petits bonbons blancs de forme ovoïde, dont la société poursuivie ne démontre pas le caractère banal, non distinctif. Au contraire, les demanderesses établissent que d'autres formes de petits bonbons sont possibles (ronds ou aplatis) et qu'un visuel montrant les mêmes petites pastilles ovales blanches (hors boîte) a été attribué (de façon spontanée et assistée) par 70 % des personnes interrogées à la marque TIC TAC. Il ne peut donc être considéré que la forme protégée par les marques est purement fonctionnelle.
Il existe des similitudes significatives entre les marques tridimensionnelles invoquées et les boîtes litigieuses transparentes de forme parallélépipédique qui sont remplies de petites sucreries ovoïdes blanches ou de couleurs orange et verte. Les différences, qui tiennent essentiellement aux bords arrondis des boîtes litigieuses, à la dimension plus grande de l'étiquette présentant une forme courbe asymétrique en son extrémité inférieure, aux mentions MIK MAKI et aux représentations (fruits sous forme de personnages animés et colorés) sur cette étiquette, n'altèrent pas la même impression visuelle dégagée par les signes en litige. Elles n’apparaîtront pas immédiatement aux yeux du consommateur moyen de petites confiseries. Les ressemblances visuelles prépondérantes, portant sur des produits identiques, génèrent un risque de confusion ou d'association, d'autant plus élevé qu’il est justifié d'une très forte reconnaissance par le public français des marques tridimensionnelles invoquées. Par conséquent, la présence des produits litigieux sur un salon professionnel, même en l'absence de tout acte de fabrication ou de commercialisation, est constitutive de contrefaçon, et l'usage des signes incriminés est en l'espèce réalisé à titre de marque, pour désigner l'origine des produits, alors que la reprise du conditionnement et de son contenu ne s'avère nullement nécessaire pour de tels produits.
La contrefaçon de la marque verbale invoquée TIC TAC par le signe MIK MAKI est caractérisée en raison des ressemblances visuelles et phonétiques très fortes entre les signes. Ceux-ci ont presque la même longueur et ont la même structure, étant chacun composés de deux termes courts, répétant les mêmes consonnes (TC pour la marque / MK pour le signe contesté) et incluant les mêmes voyelles centrales (I et A). Ils se distinguent en ce que la marque est purement verbale alors que le signe contesté est composé de caractères gras de couleur rouge. L'utilisation de ce signe, associée à l'usage des marques tridimensionnelles et appliquée à une confiserie identique à celle commercialisée sous la marque, confiserie qui jouit elle-même d'une forte reconnaissance par le public français, ne peut que générer un risque de confusion ou au moins d'association pour le consommateur moyen d'attention faible concerné qui sera enclin à attribuer une origine commune aux produits.
Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 15 février 2022, 19/21858 (M20220067)
BMB Spólkazograniczona Odpowiedzialnoscia c. Ferrero SpA et Ferrero France Commerciale SAS (venant aux droits de la SA Ferrero France)
(Confirmation TGI Paris, 3e ch., 3e sect., 7 juin 2019, 17/02478, M20190395 et TGI Paris, 28 juin 2019, 19/07511)
[1] La validité de la marque tridimensionnelle représentant le conditionnement vide en cause a également été retenue dans une autre affaire : TGI Paris, 3e ch., 2e sect., 6 nov. 2009, Ferrero SpA et al. c. Candy Team GmbH, 08/10106 (M20090619 ; PIBD 2010, 910, III-58).