Recevabilité de la demande en nullité (oui) - Loi applicable - Exposé des moyens - Substitution de visas
Validité de la marque (non) - Droit antérieur - Marque - Identité ou Similarité des produits - Catégorie générale - Imitation - Elément distinctif et dominant - Substitution du mot d'attaque - Caractère faiblement distinctif - Public pertinent - Risque de confusion - Appréciation - Notoriété de la marque antérieure
La marque contestée DUC DE CALO, enregistrée notamment pour les « bières ; Boissons alcoolisées (à l'exception des bières) ; cidres ; digestifs (alcools et liqueurs) ; vins ; spiritueux ; vins d'appellation d'origine protégée ; vins à indication géographique protégée », porte atteinte aux droits sur la marque antérieure MARQUIS DE CALON désignant des « Vins d'Appellation d'Origine Protégée Saint-Estephe provenant du Château Calon Ségur ».
C'est à juste titre que l'INPI a procédé à l'appréciation du risque de confusion entre les signes en cause au regard du grand public français, lequel est composé de consommateurs d'attention moyenne. En effet, le consommateur de vin ne correspond pas nécessairement à un public averti, connaisseur de vin et apte à éviter toute confusion. Le marché du vin concerne de plus en plus un large public, notamment par sa commercialisation en grandes surfaces et par internet, à l'échelon tant national qu'international.
Dès lors qu’ils appartiennent à la même catégorie générale de produits, les vins, même d’AOC différentes, ou provenant d’exploitations différentes, doivent être considérés comme identiques ou à tout le moins très similaires. C’est ainsi que les « vins ; vins d’appellation d’origine protégée ; vins à indication géographique protégée » visés par la marque contestée sont d’une grande proximité voire identiques aux « Vins d’Appellation d’Origine Protégée Saint-Estèphe provenant du Château Calon Ségur » de la marque antérieure. Les seconds produits entrant dans la catégorie, plus générale, des premiers.
Les signes en cause présentent des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles qui créent de très importantes ressemblances d'ensemble. Leur présentation et leur structure sont communes. Ils commencent en effet tous les deux par un titre de noblesse, à savoir « Marquis » pour la marque antérieure et « Duc » pour la demande contestée, suivi de la préposition « de ». Les titres nobiliaires sont couramment utilisés dans le domaine des boissons alcoolisées et ne présentent pas de caractère distinctif particulier en la matière. Visuellement et phonétiquement, les dénominations « calon » et « calo » ont une physionomie très similaire et se prononcent selon un même rythme, avec des sonorités d'attaque identiques et finales très proches. Ils constituent les éléments distinctifs et dominants au sein des signes en cause, ce qui renforce la similarité de ces derniers.
Les deux marques en conflit étant des marques commerciales de même nature, visant des produits identiques et similaires et présentant une architecture commune, elles sont susceptibles d’être perçues comme des déclinaisons de vins provenant d’une même exploitation ou d’exploitations commercialement liées. En effet, en matière de marques vinicoles, la pratique des « seconds vins » produits à partir de jeunes vignes d’un domaine renommé est très courante, de sorte que la marque DUC DE CALO est susceptible d’être perçue comme un « second vin » du Château Calon Ségur.
La marque MARQUIS DE CALON bénéficiant d’une certaine connaissance auprès du public, sa distinctivité s’en trouve renforcée lui offrant une protection plus étendue. En conséquence, les ressemblances importantes entre les signes en cause, la grande proximité des produits et la notoriété de la marque antérieure caractérisent le risque de confusion par association des marques pour le consommateur d’attention moyenne.
Cour d’appel de Bordeaux, 1re ch. civ., 17 mai 2022, 21/02099 (M20220155)
Mme M c. INPI et SCEA Château Calon-Ségur
(Rejet recours c. décision INPI, 12 mars 2021, NL 20-0053 ; NL20200053)