Demande de CCP - Médicament - Droit de l’UE - Protection du produit par le brevet de base - Définition fonctionnelle du produit - Produit spécifiquement identifiable (oui) - Directives et décisions de l’OEB
La demande de CCP portant sur le produit « avelumab » satisfait aux conditions de l'article 3, a), du règlement (CE) n° 469/2009 concernant le CCP pour les médicaments, tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.
Il résulte de cette jurisprudence[1] qu’un produit peut être protégé par le brevet de base au sens de l'article précité lorsqu’il répond à une définition fonctionnelle générale employée par l'une des revendications du brevet et relève nécessairement de l'invention, sans pour autant être individualisé en tant que mode concret de réalisation, dès lors qu’il est spécifiquement identifiable, à la lumière de l'ensemble des éléments divulgués par le brevet de base, et qu’il n’a pas été développé après la date de dépôt ou de priorité du brevet, au terme d'une activité inventive autonome.
En l’espèce, le brevet de base européen porte sur la découverte de nouvelles molécules : les protéines B7-4, utilisées dans le traitement du cancer. Le brevet revendique également les anticorps susceptibles de se lier avec ces protéines. La demande de CCP fait référence à une AMM communautaire octroyée pour une spécialité pharmaceutique ayant pour principe actif l’avelumab. Il n'est pas discuté que cet anticorps monoclonal humain qui se lie à un polypeptide B7-4 (appelé aussi antigène PD-L1) pour moduler la réponse immunitaire et traiter le cancer répond au problème technique posé par le brevet de base et relève de la définition fonctionnelle contenue dans ses revendications 17 et 27. Ce produit est donc implicitement et nécessairement visé par ce brevet.
Il résulte des directives de l’OEB que l'objet d'une revendication définissant un nouvel anticorps qui se lie à un antigène connu n'implique pas d'activité inventive à moins qu'un effet technique surprenant ne soit démontré dans la demande. Selon la jurisprudence de l’OEB, les méthodes pour la génération et l'identification d'un anticorps dirigé contre un antigène donné constituent des techniques de routine pour l'homme du métier. En l’espèce, il n’est pas contesté que le brevet de base décrit des protocoles permettant d'isoler et de sélectionner des hybridomes contenant des anticorps se liant à B7-4 (antigène PD-L1). Ainsi, sur la base de ses connaissances générales et de l'état de la technique à la date de priorité du brevet, l’homme du métier était en mesure d'identifier l'anticorps monoclonal humain « avélumab » de façon spécifique à la lumière des enseignements du brevet, par des essais de routine connus et maîtrisés, qui peuvent être longs et fastidieux, mais ne procèdent pas d'une activité inventive autonome.
Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 25 mai 2022, 21/08514 (B20220048)
Dana-Farber Cancer Institute Inc. c. INPI
(Annulation décision INPI, 3 févr. 2021)
[1] Voir notamment : CJUE, 3e ch., 12 déc. 2013, Eli Lilly and Company Ltd c. Human Genome Sciences Inc., C-493/12 (B20130284 ; Propr. industr., mars 2019, p. 53, note de M. Gabriel) et CJUE, 4e ch., 30 avr. 2020, Royalty Pharma Collection Trust c. Deutsches Patent- und Markenamt, C-650/17 (B20200016 ; PIBD 2020, 1140, III-1 ; Europe, juin 2020, comm. 211 de L. Idot).