Demande en nullité d’un brevet européen opposée à l’action en contrefaçon - Recevabilité (oui) - Prescription quinquennale (non) - Moyen de défense au fond - Exception de nullité du titre - Demande reconventionnelle (non)
Concurrence déloyale et parasitaire (non) - Imitation du produit - Preuve - Annulation de la saisie-contrefaçon et du rapport d’expertise judiciaire - Titre annulé
La cour d’appel a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande en nullité du brevet européen portant sur une composition pour le revêtement d’un sol et, en conséquence, a confirmé l’annulation de certaines revendications du brevet. Elle a énoncé que l'action en nullité du brevet, qui constituait en la cause un moyen de défense au fond à l'action principale en contrefaçon, pouvait être « proposée » en tout état de cause et, notamment, pour la première fois au stade de l'appel. Elle a ensuite retenu que cette action, formée « à titre reconventionnel », n'était donc pas soumise au délai de droit commun de prescription de l'article 2224 du Code civil.
Si c'est à tort que la cour d'appel a qualifié de reconventionnelle la demande d'annulation du brevet, alors qu'elle avait relevé qu'elle constituait un moyen de défense au fond, c'est à bon droit qu'elle a dit que cette demande, qui tendait seulement au rejet de l'action en contrefaçon et était donc formée par voie d'exception, n'était pas soumise à la prescription quinquennale de droit commun[1].
La cour d’appel a rejeté les demandes au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme suite à l’annulation des procès-verbaux de saisie-contrefaçon et du rapport d’expertise judiciaire qui étaient invoqués à l’appui de ces demandes. La procédure de saisie-contrefaçon étant dérogatoire au droit commun, l'annulation du titre sur lequel elle était fondée entraîne l'annulation du procès-verbal de saisie, ne laisse rien subsister de celui-ci et emporte, en conséquence, l'impossibilité absolue de se prévaloir du contenu du procès-verbal et des produits saisis, ainsi que l'anéantissement de toute mesure qui en est la suite.
Il s'ensuit que c'est à bon droit qu'après avoir annulé le brevet sur lequel était fondée l'ordonnance ayant autorisé les opérations de saisie-contrefaçon, la cour d'appel a annulé les procès-verbaux de saisie-contrefaçon et ordonné la restitution de tous les éléments saisis. Et, ayant relevé que la mesure d'expertise judiciaire ordonnée avait uniquement consisté en une analyse des produits saisis afin de les comparer aux revendications du brevet, elle a, par voie de conséquence, à bon droit annulé le rapport d'expertise judiciaire.
Cour de cassation, ch. com., 28 septembre 2022, 20-16.874 (B20220077)
Laboratoires Choisy LTEE c. Tri-Texco Inc., Orapi hygiène SAS (anciennement Argos hygiène), Gaétan C et. al.
(Rejet pourvois c. CA Paris, pôle 5, 2e ch., 24 janv. 2020, 17/12908 ; B20200001)
[1] Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 (loi PACTE), la prescription de droit commun prévue par l’article 2224 du Code civil ne s’applique plus aux actions en nullité de brevets. En effet, aux termes de l’article L. 615-8-1 du CPI, : « L'action en nullité d'un brevet n'est soumise à aucun délai de prescription ». Il est de même pour les marques et les dessins et modèles.
Voir également, à propos de la nullité de la marque JOURS DE France invoquée par voie d’exception : CA Paris, pôle 5, 2e ch., 11 mars 2022, Entreprendre SA c. Société du Figaro SAS, 20/11480 (M2022009, PIBD 2022, 1190, III-5).