1) Propriété de la demande de brevet - Contrat de cession de la demande de brevet international - Concession de licence exclusive de la demande de brevet européen - Défaut de paiement d’une annuité par le cessionnaire - Clause résolutoire - Validité de la communication de la mise en demeure de payer - Loi applicable - Droit de l’UE - Rétrocession des droits - 2) Opposabilité du transfert de propriété à l’égard du licencié exclusif (non) - Inscription au registre - Opposabilité de la licence exclusive à l’égard du cédant (oui) - Subrogation dans les droits du cessionnaire
Un contrat de cession d’une demande de brevet international, déposée sous priorité d’une demande de brevet européen, a été conclu entre une société panaméenne et une société suisse. Cette dernière a concédé une licence exclusive de la demande de brevet européen à une société française. L’inventeur désigné dans la demande de brevet européen a informé la société licenciée de la caducité de tous les contrats consentis à la société suisse et lui a enjoint de cesser toute production en lien avec le brevet. La société licenciée a alors agi en contrefaçon de brevet résultant de l’utilisation par l’inventeur de la fausse qualité de titulaire de la demande de brevet. Suite à la disjonction de la procédure, il a été sursis à statuer sur la demande relative à la contrefaçon dans l'attente de la délivrance du brevet.
Le contrat de cession stipulait une clause résolutoire aux termes de laquelle, à défaut de paiement d'une échéance due par l'acquéreur, un mois après une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception restée sans effet, le vendeur sera en droit d'invoquer la résolution pure et simple de la cession et retrouvera alors la pleine propriété du brevet cédé.
Selon les dispositions du règlement (CE) n° 593/2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), un contrat est régi par la loi du pays dans lequel la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a sa résidence habituelle. Dans un contrat de cession de brevet, la prestation principale est la mise à disposition du brevet. Dès lors, en l’espèce, le droit du pays du cédant, à savoir la loi panaméenne, est applicable.
Au regard du droit panaméen, la lettre de mise en demeure de payer, communiquée par le cédant au cessionnaire, est valide et produit des effets juridiques en vertu du contrat, même si cette mise en demeure a été remise en main propre au cessionnaire, et non par le biais d'une lettre recommandée avec avis de réception, comme le stipulait le contrat. Le formalisme requis avait pour objectif de garantir la réception effective de la mise en demeure par le débiteur. En conséquence, la présente notification, ayant date certaine, de la mise en demeure ne suffit pas à faire échec à l'application de la clause résolutoire.
La mise en demeure étant restée sans effet, la propriété de la demande de brevet a été rétrocédée. Il est constant que la clause résolutoire litigieuse stipulait que le vendeur, qui retrouve la pleine propriété du brevet cédé, s'occupera des formalités de transfert auprès de l'OMPI. Dès lors, en l'absence de toute formalité de publication, le transfert de propriété consécutif à la rétrocession au profit du vendeur n'est pas opposable à la société licenciée, ni à la société venant à ses droits.
Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 21 septembre 2022, 20/14418 (B20220074)
Alain M et Finter Lane SA c. Mopi SASU (venant aux droits de la société Meca Production SA)
(Confirmation partielle TJ Paris, 3e ch., 3e sect., 6 août 2020, 17/12932)