Doctrine et analyses
Compte rendu

Teva c. Novartis : faites tourner !

PIBD 1208-II-1
Refus d’octroyer une déclaration de non-contrefaçon de brevet au Royaume-Uni aux seules fins d’utilisation dans une action en contrefaçon à l’étranger

d’après l’article de Reuben Jacob* et Janet Strath* : Teva v. Novartis: spinning around, in EIPR, (45), 5, mai 2023, p. 292-295

Texte

Cet article relate la décision de la Cour d’appel d’Angleterre et du pays de Galles sur l’octroi, par la Patents Court, d’une déclaration dite Arrow et son utilisation dans une procédure étrangère.

Novartis commercialise au Royaume-Uni et dans l’Union européenne un traitement contre la sclérose en plaques, le fingolimod, sous la marque Gelenya. Ce traitement est protégé au Royaume-Uni par un brevet européen sur lequel Novartis détient une licence jusqu’en octobre 2018. En juillet 2015, il dépose une demande de brevet européen sur une deuxième application thérapeutique concernant un régime posologique.

En février 2022, alors que la demande de brevet est pendante, Teva dépose une demande d'Arrow declaration (ci-après dénommée « déclaration ») devant la Patents Court (l’équivalent d’une déclaration de non-contrefaçon demandée au tribunal) afin de pouvoir commercialiser sans entrave une version générique du médicament de Novartis.

En mars 2022, Novartis engage une action en contrefaçon contre Teva et cinq autres fabricants ou fournisseurs de médicaments génériques et demande des mesures provisoires afin d’empêcher la commercialisation de la version générique du fingolimod au Royaume-Uni.

En août 2022, Novartis informe Teva qu’il retire la désignation du Royaume-Uni de sa demande de brevet européen et qu’il met un terme à son action en contrefaçon au Royaume-Uni.

Le brevet européen est délivré le 12 octobre 2022. Novartis engage alors une action en contrefaçon de son brevet et demande des mesures provisoires contre Teva dans plusieurs États membres, dont l’Allemagne, et un autre pays qui n’a pas été nommé.

La déclaration est refusée à Teva. Le juge de la Patents Court estime que cette déclaration n’est pas nécessaire pour corriger l’incertitude du marché et que Teva n’a pas de raison impérieuse de l’obtenir, son objectif étant uniquement d’influencer une juridiction étrangère sur une question régie par le droit de cette juridiction.

Le refus de la déclaration a été confirmé en appel. La cour d’appel a considéré que les juridictions d’Angleterre et du pays de Galles ne sauraient accorder de telles déclarations dans le seul but d’influencer une juridiction étrangère. Il n’est pas du ressort des juridictions anglaises et galloises de donner des avis à des juridictions étrangères qui sont saisies d’affaires destinées à être jugées en application de leur droit national.

Dans cette affaire, la spin-off value des décisions de la Patents Court dans des juridictions étrangères a été au cœur des débats. Le juge Arnold a défini la spin-off value d’une décision comme étant « sa valeur, pour la partie gagnante, allant au-delà de l’effet juridique au Royaume-Uni ».

Le juge Arnold a examiné quatre affaires1 où s’est posée la question de savoir si la Patents Court devait accorder une déclaration destinée à être utilisée dans une procédure étrangère. Dans l'une de ces affaires, le juge a considéré que bien que la déclaration puisse être utile, elle pouvait s’apparenter à de l’impérialisme judiciaire.

Il ressort de cette affaire qu’il n’est actuellement pas possible d’utiliser un tribunal anglais pour obtenir une décision en l’absence de titre national, ce qui limite la spin-off value des Arrow declarations pour les actions en justice engagées dans d’autres États contractants.

Texte

Les opinions exprimées dans les articles cités n’engagent que leurs auteurs et ne représentent pas la position de l’INPI.