Décision d’exclusion d’un membre de l’association - Validité (non) - Statuts de l’association - Formalité requise - Décision relevant de l’assemblée générale
Contrefaçon de la marque semi-figurative (non) - Reproduction - Autorisation d’usage - Membre de l’association titulaire
Contrefaçon par atteinte à une IGP (oui) - Droit de l’UE - Évocation - Utilisation de noms géographiques - Emploi d’un signe figuratif
Validité de la marque (non) - Atteinte à l’IGP - Usage légalement interdit
La contrefaçon de la marque BLÉ NOIR Tradition Bretagne GWINIZH DU BREIZ n’est pas caractérisée. La demande est fondée sur le seul fait que la société défenderesse n'a plus bénéficié de la certification et que, suite à son exclusion de l'association qui en a résulté, elle a continué à reproduire la marque sur son site internet et des emballages de farine. Or, le fait qu’elle n'ait pas reçu l'habilitation procédant de la certification du cahier des charges de l’IGP est sans incidence sur son droit éventuel à utiliser la marque en litige. En effet, cette habilitation n'a d'incidence que sur la protection de l'IGP. Par ailleurs, la décision d’exclusion de la défenderesse de l'association a été annulée, dès lors que cette dernière n’a pas justifié d'une délibération de ses organes sociaux mettant fin à l'autorisation d'utiliser la marque. La défenderesse est donc réputée n'avoir jamais été exclue et elle est restée en droit d’utiliser la marque.
Par arrêté du 20 décembre 2006, l'emploi de l'indication géographique « Bretagne » ou « Breizh » a été interdit dans l'étiquetage, la présentation commerciale, les factures et les documents de toute nature de farines ne répondant pas au cahier des charges de l'IGP « Farine de blé noir de Bretagne » ou « Farine de blé noir - Gwinizh du Breizh » transmise pour enregistrement et des produits qui lui sont comparables par nature. La défenderesse, qui ne justifie pas avoir été habilitée à se prévaloir de cette IGP, a fait usage de deux visuels faisant directement mention des appellations « Farine de Blé noir de Bretagne » et « Farine de blé noir Breton ». Leur utilisation contrevient à la protection de l'IGP au sens de l’article 13, 1°, b) du règlement (CE) n° 510/2006 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires. L'évocation de la dénomination enregistrée est en effet caractérisée par la seule utilisation de ces termes.
Il résulte d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne[1] que l’évocation d’une dénomination enregistrée est susceptible d’être produite par l’emploi de signes figuratifs. Or, un troisième visuel utilisé par la défenderesse ne fait aucune référence aux mots « Bretagne » ou « breton », mais présente une femme en costume traditionnel tenant dans ses bras un sac de farine et un bouquet de fleurs. Si les éléments du vêtement ne permettent pas de caractériser un costume traditionnel nécessairement breton, l'adjonction sur le visuel litigieux de la mention « La Bigouden » permet de rattacher la représentation aux pays Bigouden qui constituent une partie emblématique de la région Bretagne. Ces références, prises dans leur ensemble, évoquent, pour un consommateur français, une origine bretonne de la farine de blé noir ainsi commercialisée. Par conséquent, les trois visuels litigieux constituent une contrefaçon au sens des dispositions de l'article L. 722-1 du CPI.
La marque LES MONTS D’ARRÉE TRADITION BRETAGNE de la société poursuivie est annulée sur le fondement de l’article L. 711-2 du CPI, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2019-1169. En effet, elle emploie l'indication géographique « Bretagne » ou « Breizh » pour désigner des farines qui ne répondent pas au cahier des charges de l'IGP.
Cour d’appel de Rennes, 3e ch. com., 27 septembre 2022, 21/06317 (M20220332)
Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO) et Association Blé Noir Tradition Bretagne c. Émile Le Rhun SARL
(Infirmation partielle TGI Rennes, 29 juill. 2014 ; sur renvoi après cassation CA Rennes, 3e ch. com., 7 févr. 2017, 14/08825, M20170063 ; Cass. com., 4 déc. 2019, 17-31.094, M20190336)
[1] CJUE, 4e ch., 2 mai 2019, Queso Manchego, C-614/17 (P20190058 ; PIBD 2019, 1118, III-304 ; L'Essentiel, juill. 2019, p. 5, note de S. Chatry ; Europe, juill. 2019, p. 18, note d'A. Rigaux ; D IP/IT, sept. 2019, p. 507, note de C. Maréchal-Pollaud-Dulian ; Propr. industr., nov. 2019, p. 23, note de C. Le Goffic ; RTD Com, 4, oct.-déc. 2019, p. 897, note de J. Passa).