Jurisprudence
Marques

Forclusion par tolérance de l’action en contrefaçon de la marque GourmiBox en raison de la connaissance, avant l'envoi d'une mise en demeure, de l’usage de la marque postérieure

PIBD 1187-III-3
CA Paris, 13 avril 2022

Recevabilité de l’action en contrefaçon (non) - Forclusion par tolérance - Point de départ du délai - Connaissance de l'exploitation de la marque postérieure - Mise en demeure

Texte
Marque n° 3 936 696 de la société Gourmibox
Marque n° 12 956 918 de la société Gastron’Home
Texte

L’action en contrefaçon de la marque GourmiBox est irrecevable, la société demanderesse ayant toléré l’usage de la marque postérieure La GOURMET BOX TERROIR, VOYAGE & GASTRONOMIE pendant plus de cinq ans.

En application des dispositions de l’article L. 716-4-5 du CPI, le délai de forclusion commence à courir à compter de la date à laquelle le demandeur a eu connaissance de l'usage effectif de la marque seconde.

En l’espèce, la date de la mise en demeure de la société poursuivie ne saurait être considérée comme le point de départ du délai de forclusion. En effet, cette société démontre avoir déposé sa marque, réservé le nom de domaine lagourmetbox.com et ouvert un compte Facebook à ce nom antérieurement à cette date. Par ailleurs, les ventes des box litigieuses, via le site internet éponyme, ont également été ouvertes antérieurement à cette date, ce lancement d'activité ayant été accompagné d'articles parus sur des sites spécialisés. De plus, il ressort de pièces émanant d'un constat internet réalisé par un huissier de justice que la box litigieuse a été présentée sur les deux principaux sites de référencement des box, concomitamment à celles commercialisées par la demanderesse qui était également référencée sur ces mêmes sites. La société poursuivie est apparue, sur ce secteur de niche et à cette époque, comme un concurrent direct de la société demanderesse, utilisant la même technique de vente par internet à destination des consommateurs français, les mêmes réseaux de publicité en France, et déployant des efforts conséquents de communication sur le même marché pour le lancement, la promotion et la commercialisation de box sous sa marque, pour des produits identiques à ceux protégés par sa marque.

Il résulte de cet ensemble d’éléments précis et concordants que la société demanderesse a eu nécessairement connaissance de l'existence et de l'exploitation effective de la marque litigieuse antérieurement à la date de la mise en demeure et, en conséquence, en a sciemment toléré l'usage depuis cette date.

Il importe peu que le nombre de box litigieuses commercialisées antérieurement à la date de la mise en demeure ait été relativement faible. En effet, l'article L. 716-4-5 du CPI n'impose pas l'existence de la preuve d'un usage sérieux de la marque seconde.

Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 13 avril 2022, 21/12002 (M20220128)[1]
Gourmibox SAS c. Gastron'Home SL
(Confirmation TJ Paris, ord. JME, 3e ch., 3e sect., 8 juin 2021, 20/07394)

[1] À rapprocher de : CJUE, 4e ch., 19 mai 2022, Heitec AG c. Heitech Promotion GmbH et RW, C-466/20 (M20220190 ; publiée dans le présent PIBD 2022, 1187, III-2).