Jurisprudence
Marques

Irrecevabilité de l’action en contrefaçon de la marque REFLEA pour défaut d’usage sérieux - État de santé du dirigeant de la société licenciée non constitutif d’un juste motif de non-usage

PIBD 1203-III-3
CA Lyon, 9 février 2023

Recevabilité de l’action en contrefaçon (non) - Défaut d’usage sérieux de la marque antérieure invoquée - Juste motif de non-usage - Preuve - État de santé du dirigeant de la société licenciée

Texte
Marque n°  3813 066 de Nathalie A
Texte

Le titulaire de la marque REFLEA est irrecevable en son action en contrefaçon et en ses demandes d'indemnisation de ce chef, en application de l’article L. 716-4-3 du CPI. En effet, il ne démontre pas l'existence d'un juste motif au non-usage de sa marque au cours des cinq années précédant la date à laquelle la demande en contrefaçon a été formée.

Il ressort de la jurisprudence que deux conditions principales cumulatives sont nécessaires pour établir l'existence d'un juste motif au non-usage d'une marque. Ce motif doit être indépendant de la volonté du titulaire de la marque. Il doit en outre présenter un lien direct avec la marque au point de rendre l'usage de celle-ci, si ce n'est impossible, tout du moins déraisonnable.

En l’espèce, la marque REFLEA a été concédée en licence à une société. Une attestation de paiement d'indemnités journalières émanant de la caisse primaire d’assurance maladie ainsi que différents documents médicaux établissent que le président de cette société a été en arrêt de travail pendant la période de cinq ans précédant l’action en contrefaçon, en raison d'une affection de longue durée.

Toutefois, les problèmes de santé du dirigeant de la société licenciée ne suffisent pas à établir que celle-ci n'était pas en mesure d'exploiter la marque REFLEA pendant la période considérée [1]. Au surplus, le titulaire ne justifie par aucune pièce des motifs pour lesquels la société licenciée n'a pas procédé à l'exploitation de cette marque avant l’arrêt maladie de son président. Par ailleurs, le titulaire avait la possibilité de résilier le contrat de licence, faute d'exploitation de la marque par la société licenciée.

Ainsi, il n’est pas démontré que le non-usage de la marque REFLEA était indépendant de la volonté du titulaire, ni que les problèmes de santé du dirigeant de la société licenciée présentaient un lien suffisamment direct avec la marque au point de rendre l'usage de celle-ci déraisonnable.

Cour d’appel de Lyon, 6e ch., 9 février 2023, 22/03105 (M20230029) [2]
Nathalie A c. CPE SARL
(Confirmation TJ Lyon, ord. du juge de la mise en état, 21 mars 2022, 20/03493)

[1] Sur l’état de santé du titulaire de la marque, invoqué comme juste motif de non-usage dans le cadre d’une demande en déchéance, voir : CA Versailles, 12e ch., 2e sect., 26 nov. 2009, Germain B et al. c. Moët Hennessy Diageo SAS (M, 08/04527 (M20090599 ; PIBD 2010, 911, III-95).

[2] Il s’agit de l’une des rares décisions statuant sur la recevabilité d’une action en contrefaçon sur le fondement de l’article L. 716-4-3 du CPI, issu de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019. Ce nouvel article transpose l'article 17 de la directive (UE) n° 2015/2436 selon lequel le titulaire d'une marque ne peut interdire l'usage d'un signe que dans la mesure où il n'est pas susceptible d'être déchu de ses droits au moment où l'action est intentée. Voir également : CA Paris, pôle 5, 2e ch., 10 juin 2022, Simon B et al. c. L'Oréal SA, 21/19296 (M20220186) et TJ Paris, 3e ch., 3e sect., ord. juge de la mise en état, 22 févr. 2022, E. Rémy Martin & Co SAS c. Sire Spirits LLC et al., 21/3340 (M20220222).