Validité du contrat de licence non-exclusive de marque (non) - Restitution de la somme versée -1) Absence de cause du contrat (non) - Droits du concédant sur la marque (oui) - Défaut d’inscription de la licence exclusive de marque au RNM - 2) Erreur sur les qualités essentielles (oui) - Vice du consentement - Nullité
La demanderesse s’est vue concéder une licence d’exploitation non-exclusive de la marque Philae Services Funéraires par la société défenderesse, elle-même bénéficiaire d’une licence exclusive d'exploitation sur cette marque consentie, à titre gratuit, par son dirigeant. Elle ne peut solliciter la répétition de la somme qu’elle a versée à titre de droit d’entrée, en invoquant l’absence de droit de la société défenderesse sur la marque.
L'absence de publication de cette licence exclusive n’a pas pour effet d'affecter sa validité, mais prive seulement son bénéficiaire de la possibilité de l'opposer aux tiers. Par ailleurs, elle n'a jamais privé la société défenderesse de la capacité de consentir une sous-licence d'exploitation à la demanderesse. Le contrat de licence non-exclusive ne se trouve donc pas dépourvu de cause. Il importe peu qu’il ait consenti une licence en sa double qualité de titulaire concédant et de président de la société concessionnaire. En effet, la demanderesse ne saurait invoquer l'adage selon lequel « nul ne peut se constituer un titre à lui-même », dès lors que les parties au contrat sont juridiquement distinctes.
En revanche, la demande en répétition de la somme versée fondée sur l'erreur sur les qualités essentielles de la prestation due est justifiée.
En l’espèce, les documents commerciaux versés aux débats présentent « Philae Services Funéraires » comme un réseau de franchisés indépendants, offrant aux professionnels affiliés un accompagnement permanent (fourniture d'un logiciel de gestion, formation aux techniques de vente, information juridique, animation de réseau, partenariat avec des fournisseurs du secteur funéraire). L’un des documents précise même que le franchisé bénéficiera d'un appui dans l'élaboration de son plan de développement financier. Au vu de ces documents, la demanderesse a pu croire légitimement qu’il lui était proposé de rejoindre un réseau de franchisés. La remise, lors de la prise de contact avec le dirigeant de l’entreprise, d'une étude commerciale a entretenu cette croyance, dès lors qu'elle est caractéristique de la conclusion d'un contrat de franchise. Pour autant, le contrat litigieux ne reprend pas l'ensemble des engagements promis sur les supports de communication. Il n'emporte pas transmission du savoir-faire, qui est une des caractéristiques essentielles d’un contrat de franchise.
Par ailleurs, la preuve est suffisamment rapportée que la demanderesse a cru, sur la foi de cette communication promotionnelle, souscrire un contrat de franchise plutôt qu'une simple licence de marque, et qu'elle a commis une erreur sur l'étendue exacte des engagements de l’autre partie, ainsi que la nature même de la convention. Une telle erreur caractérise un vice du consentement, au sens de l'article 1130 du Code civil, et emporte la nullité du contrat.
Cour d’appel de Lyon, 1re ch. civ. A, 20 octobre 2022, 20/03189 (M20220277)
Philae Développement SAS c. Mme [S]
(Confirmation partielle TJ Lyon, 1re ch., 4 mars 2020, 18/09713)