Opposition à enregistrement - Atteinte à la marque de renommée - Droit de l’UE - Portée de la renommée - Services concernés - Public pertinent - Existence d’un lien entre les signes - Appréciation globale - Similitude entre les signes - Proximité des services - Risque d’association - Risque sérieux d’atteinte - Profit indument tiré de la renommée de la marque
La renommée de la marque antérieure invoquée FRANCE.2 a été, à juste titre, reconnue pour les services désignés à l’enregistrement qui relèvent des services de télécommunication, de diffusion et de transmission de données, au regard du public pertinent de ces services, soit le « grand public ». Mais elle aurait également dû être retenue pour les services de « divertissement », au vu des mêmes pièces produites au cours de la procédure d’opposition, comme notamment la page Wikipedia concernant la chaîne de télévision France 2 qui indique que celle-ci est la « deuxième chaîne de France en terme d’audience » et qui met clairement en avant le fait qu’elle propose, entre autres, des divertissements.
Compte tenu des ressemblances d’ensemble et de la construction commune des signes, le signe contesté « FRANCE 8 » est similaire à la marque antérieure, pouvant ainsi apparaître comme une déclinaison de celle-ci pour désigner une nouvelle chaîne de télévision. Il existe un risque sérieux que les consommateurs associent les services de « divertissement » couverts par la demande d’enregistrement aux services de « divertissement » et de « transmission d'informations en matière de divertissements » couverts par la marque FRANCE.2, en transférant les qualités attribuées à la marque antérieure de renommée aux services de la demande d'enregistrement. Ainsi, l'usage de la marque FRANCE 8 pour des services de « divertissement » risque de permettre à celui qui a présenté la demande d’enregistrement de retirer un profit indu de la renommée de la marque antérieure.
Cour d'appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 9 mars 2022, 21/05971 (M20220088)[1]
France Télévisions SA c. INPI et L'Asso des Jours Heureux
(Annulation partielle décision INPI, 12 mars 2021, OP 20-2902 ; O20202902)
[1] Il s’agit de la première décision de justice qui statue sur un recours contre une décision rendue par le directeur général de l’INPI dans le cadre d’une opposition fondée sur le régime de l’atteinte à la marque de renommée. Ce nouveau motif relatif de rejet a été intégré dans le Code de la propriété intellectuelle (cf. article L. 712-4 al. 1 2°, lu en combinaison avec les articles L. 711-3 I. 2° et L. 712-7 al. 1 4°) par l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, transposant la directive (UE) 2015/2436 issue de la réforme du « Paquet Marques ». Auparavant, ce motif n’était proposé aux États membres qu’à titre d’option par l’article 4 § 4 de la directive 89/104/CEE.