Opposition justifiée (oui) - Maintien du brevet sous une forme modifiée
Admissibilité de pièces (non) - Production hors délai
Revendications 1, 2 et 12 - Exposé de l’invention suffisant (oui) - Homme du métier
Revendication 1 - Nouveauté (non) - État de la technique - Antériorité de toute pièce
Requête subsidiaire 2 - Modification du brevet - Revendication 1 - Ajout d’une caractéristique - Nouveauté (oui) - Activité inventive (oui)
L’opposition formée à l’encontre du brevet français intitulé « Capsules fermées biodégradables à usage unique contenant une substance sous forme de poudre » est reconnue justifiée et le brevet est maintenu sous une forme modifiée.
L’invention objet du brevet contesté est une capsule biodégradable contenant une poudre alimentaire soluble pour la préparation d’une boisson, et son procédé de fabrication.
L’opposant a demandé la révocation totale du brevet contesté, sur la base des motifs d’opposition tenant au défaut de nouveauté et d’activité inventive et à l’insuffisance de l’exposé de l’invention dans le brevet.
La revendication 1 du brevet tel que délivré porte sur une capsule constituée de deux feuilles identiques, caractérisée en ce que chacune des feuilles est constituée d’au moins deux couches biodégradables, une première couche étant un film choisi parmi un film de cellulose, de polymère acide polylactique, de polymère polyhydroxyalcanoate, de polymère poly(butylène succinate) ou de papier, et une deuxième couche étant choisie parmi les non-tissés constitués d’un matériau biodégradable ou les filtres tissés constitués d’un matériau biodégradable.
L’objet de cette revendication manque de nouveauté par rapport à deux documents de l’état de la technique concernant des capsules de poudre alimentaire, qui divulguent chacun l’ensemble de ses caractéristiques.
Le document (P3), publié en 1994, est une demande de brevet portant sur des capsules dont les feuilles comportent des couches pouvant être constituées de polyéthylène téréphtalate (PET).
Or, il ressort de documents postérieurs de l’état de la technique (P47 et P59) qu’a été découverte en 2016 une bactérie capable de produire des enzymes qui dégradent le PET en acide téréphtalique et en éthylène glycol, « deux monomères respectueux de l'environnement ». Il en résulte que le PET, constituant possible des capsules de la demande de brevet antérieure, est un produit biodégradable.
La définition du mot « biodégradable » qui figure dans le brevet contesté n’est pas intégrée à la revendication 1 et ne peut donc servir à la limiter. Il est par ailleurs relevé que cette définition indique que le dioxyde de carbone, l’eau et le méthane ne sont que des exemples possibles des produits de la biodégradation, rien n’exigeant donc que les constituants de la capsule objet de la revendication 1 se décomposent uniquement en ces produits.
La dégradation du PET par des enzymes, telle qu’indiquée par les documents P47 et P59, est donc conforme à l’exigence de biodégradabilité formulée dans la revendication 1.
À cet égard, l’établissement de la biodégradabilité du PET n’est pas issue d’une modification du PET ou de son procédé de fabrication, mais de la découverte d’éléments extérieurs, les enzymes produites par une bactérie capable de biodégrader les objets en PET préexistants. Dans la mesure où ni le PET mentionné dans le document P3 ni le PET mentionné dans les documents P47 et P59 ne sont précisés d’une manière ou d’une autre, il convient de considérer qu’il s’agit du même matériau, le titulaire du brevet n’ayant apporté aucune preuve allant dans le sens contraire. Le PET est donc biodégradable exactement de la même façon. Le fait que l’étude montrant la biodégradabilité du PET soit largement postérieure à la publication du document P3 est par conséquent sans importance. De même, est indifférent le fait que les auteurs du documents P3 n’avaient pas connaissance à l’époque de sa publication de la biodégradabilité du PET de leur invention.
L’objet de la revendication 1, en ce qu’il porte sur la biodégradabilité du matériau constituant une des couches de la capsule de poudre alimentaire, n’est donc pas nouveau.
L’autre document (P4) de l’état de la technique divulgue une capsule contenant une dose de café en poudre entre deux feuilles pourvues chacune d’une couche d’un matériau de liaison.
Le titulaire indiquait que ce matériau de liaison ne pouvait être considéré comme une couche au sens de la revendication 1 du brevet contesté. En particulier, n’étant appliqué que de façon localisée, il ne constituerait pas un film tel que revendiqué dans le brevet contesté.
Dans le document P4, le matériau de liaison peut être limité à la zone de contact entre les feuilles, cette solution étant avantageuse par rapport aux inventions précédentes dès lors que le matériau de liaison peut être couteux et superflu sur les autres zones. Cette disposition n’est cependant qu’une possibilité et n’est en rien obligatoire, le document P4 ne l’évoquant ni dans l’objectif de son invention, ni dans sa revendication principale mais seulement dans une revendication dépendante, illustrant ainsi son caractère optionnel. En particulier, le document P4 indique explicitement que cette limitation du matériau de liaison offre une possibilité d’optimisation de son utilisation « contrairement au boîtier traditionnel, où le matériau thermoscellant est disposé sur toute la surface de la cartouche » et que la différenciation avec l’étalement du matériau sur toute la surface de la seconde couche n’est qu’un mode de réalisation préférentiel.
Par contraposée, le document P4 divulgue un mode de réalisation dans lequel le matériau de liaison est présent sous la forme d’un film sur toute la surface des feuilles. Il en résulte que l’objet de la revendication 1 manque de nouveauté au regard du document P4. Le brevet ne peut donc être maintenu tel que délivré.
Décision INPI, 9 août 2024, OPP 23-0008 (OB20230008)
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