Recevabilité de l'action en contrefaçon (oui) - Titularité des droits d'auteur (oui) - Personne morale - Présomption de titularité - Exploitation non équivoque sous son nom - Identification du modèle - Création par un salarié - Cession des droits
Protection du modèle au titre du droit d'auteur (oui) - Originalité - Combinaison d'éléments connus - Matière - Transposition dans un autre domaine - Tendance de la mode - Idée - Choix arbitraires - Effort créatif - Empreinte de la personnalité de l'auteur
Contrefaçon (oui) - Reproduction de la combinaison - Tendance de la mode - Différences de détail - Impression d'ensemble
Concurrence déloyale (oui) - Autre version du modèle - Absence de droits privatifs - Copie quasi-servile - Risque de confusion - Succès commercial - Apposition de la marque indifférente
Préjudice résultant de la contrefaçon - Manque à gagner - Masse contrefaisante - Clientèle différente - Vente à prix inférieur - Bénéfices réalisés par le contrefacteur - Préjudice moral - Modèle phare - Banalisation - Dépréciation
Le modèle de doudoune invoqué est original et bénéficie donc de la protection par le droit d'auteur. Ce modèle est le fruit d'une collaboration entre la société demanderesse et une autre société qui est à l'origine d'une technologie permettant de fabriquer des modèles de doudoune à la fois légers et chauds. L'empreinte de la personnalité de l'auteur est à rechercher dans l'aspect global de l'œuvre prise dans la combinaison de chacun de ses éléments, fussent-ils connus. Or, la combinaison de la matière, certes connue, dont est composé le modèle de doudoune, et de la forme citadine et féminine du vêtement conférée par la coupe courte et cintrée, les manches ajustées, les poches plaquées, ainsi que par le col, le bout des manches et le haut des poches gansés, témoigne de choix libres et arbitraires et démontre un effort créatif portant l'empreinte de la personnalité de l'auteur. Bien que la doudoune soit passée du statut d'article de sport à celui de vêtement tendance, il n'en demeure pas moins que combiner un vêtement matelassé de sport d'hiver avec une forme de veste citadine courte et cintrée comportant des finitions soignées ne revient pas à s'approprier une idée. La banalité de cette combinaison n'est par ailleurs nullement démontrée, d'autant que l'ensemble des modèles de vêtements produits par la société défenderesse n'établit pas l'existence d'une combinaison équivalente montrant que l'auteur se serait contenté de s'inspirer des tendances de la mode, sans faire œuvre de création.
La contrefaçon du modèle de doudoune invoqué est caractérisée. La reprise de la combinaison caractérisant l'originalité du modèle confère aux deux vêtements en présence une physionomie comparable, à savoir celle d'une doudoune légère de forme courte et cintrée à l'allure citadine et féminine, qui n'est pas la conséquence de la reprise des tendances de la mode. La contrefaçon s'appréciant par les ressemblances et non par les différences, les quelques différences existant entre les deux vêtements en cause, qui ne portent que sur des détails, ne sont pas de nature à écarter l'impression d'ensemble très proche produite sur le public.
La commercialisation d'une doudoune, qui reprend les caractéristiques d'une doudoune présentée par la société demanderesse comme une variante du modèle protégé au titre du droit d'auteur comportant un matelassage différent, caractérise une faute constitutive de concurrence déloyale. Les différences existant entre ces deux doudounes ne sont en effet pas de nature à écarter de grandes ressemblances qui leur confèrent une physionomie d'ensemble quasi-identique et qui sont susceptibles d'entraîner un risque de confusion pour le public moyennement attentif, constitué du consommateur de produits de prêt-à-porter. Il en est ainsi d'autant plus que la doudoune invoquée a rencontré un succès commercial et qu'elle est devenue l'une des références de la marque de la demanderesse, ce dont a eu connaissance la société défenderesse qui se présente elle-même comme une professionnelle en la matière ayant son propre bureau de style. La circonstance que chacun des vêtements en cause porte une marque distincte et connue n'est pas exclusive d'un risque de confusion, le public pouvant être amené à croire à l'existence d'un partenariat entre les deux enseignes.
Cour d'appel de Paris, pôle 5, 2e ch., 26 novembre 2021, 20/03316 (D20210069)
Comptoir des Cotonniers SAS c. Monoprix SAS et Monoprix Exploitation SAS
(Infirmation partielle TJ Paris, 3e ch., 3e sect., 10 janv. 2020, 17/14441)