Déchéance partielle de la marque - Usage sérieux (oui) - Usage suffisant
L’INPI a fait droit à la demande en déchéance pour défaut d'usage sérieux de la marque weezee pour les services désignés à l’enregistrement, à l'exception des services de « télécommunications ; services d’affichage électronique (télécommunications) ». Le signe contesté est utilisé pour une application permettant à son utilisateur de générer un QR code facilitant l'accès à un réseau internet WIFI. C’est à juste titre que l'INPI a retenu qu'un tel service, qui consiste à proposer une connexion par WIFI au réseau internet au moyen d’une application qui permet d’économiser son forfait de téléphone portable en connectant celui-ci à des réseaux WIFI partenaires, correspond à un service de « télécommunications ». En effet, conformément à la destination d’un tel service, il assure le transfert, l’émission et la réception d’informations. En outre, l’application qui opère la conversion d’un code WIFI en un QR code généré par affichage sur un smartphone relève des « services d’affichage électronique ». Concernant ces services, il est établi un usage de la marque qui ne saurait être regardé comme symbolique et exclusivement destiné à maintenir les droits conférés par la marque. En particulier, la promotion de celle-ci sur les réseaux sociaux, qui vise à créer ou à conserver des parts de marché au profit des services protégés, constitue un usage conforme à la fonction de garantie d’origine de la marque. Ont été pris en considération pour apprécier l’usage sérieux, la taille de l’entreprise (TPE) et la nature du service (application destinée à une fonction de communication bien circonscrite et utile pour un nombre restreint de consommateurs).
CA Paris, pôle 5, 2e ch., 7 juin 2024, Seedeck Limited c. INPI et al., 23/07002 (M20240149)
(Confirmation décision INPI, 20 janv. 2023, DC 22-0017 ; DC20220017)
Mesures provisoires (non) - Vraisemblance de la contrefaçon de marque (non) - Référence nécessaire
La reproduction des marques verbales ACCROPODE et ECOPODE, sur les sites internet d’une société exerçant une activité d’assistance aux entreprises chargées de la pose et de l’entretien de blocs artificiels pour la protection d’ouvrages maritimes et fluviaux, ne constitue pas une contrefaçon vraisemblable. Ces marques n’apparaissent sur les sites litigieux que pour identifier les blocs utilisés sur les chantiers auxquels la société défenderesse a participé. Leur reproduction vise à fournir au public une information compréhensible et complète sur la destination des services proposés. La défenderesse n’apparaît en outre jamais comme un fournisseur officiel de la technologie des demanderesses. Elle n’offre pas de blocs artificiels à la vente ni n’oriente ses clients vers d’autres blocs libres de droits. Il ressort par ailleurs des termes employés sur le site une claire différenciation entre les services offerts par les parties. Le risque de confusion allégué dans l’esprit des professionnels des travaux de construction et d’entretien de digues ou de brise-lames n’est donc pas démontré. Dès lors, il n’apparaît pas avec un degré suffisant de vraisemblance que la référence aux marques ACCROPODE et ECOPODE pour des services similaires à certains de ceux visés à l’enregistrement n’est pas justifiée. La société demanderesse peut donc bénéficier de l’exception de référence nécessaire.
TJ Paris, ord. réf., 18 juin 2024, Artelia SAS et al. c. Concrete Layer Assistance Survey SLU et al., 23/56861 (M20240155)
Protection par le droit d’auteur (oui) - Originalité
La boîte en forme de fleur dénommée « Magnolia », qui sert de contenant d’aliments, est une œuvre originale. La créatrice revendique des droits d’auteur sur les caractéristiques suivantes : boîte en carton érigée à la verticale, avec une base et des côtés plats, huit rabats et un système d'auto-fermeture par pliage, pouvant être aplatie pour se transformer en une assiette révélant des pétales arrondis. Il est établi qu’elle a procédé à des choix de forme, de pliage et de fermeture sans attache alliant fonction, forme et émotion. Ces choix arbitraires et esthétiques, même s'ils empruntent au concept de pliage en origami, utilisé antérieurement à la date de divulgation de la boîte contestée, font que l'aspect global de l'œuvre, qui figure un bourgeon qui se déploie en fleur à pétales arrondis, porte l'empreinte de la personnalité de son auteur. En conséquence, les modèles divulgués antérieurement, qui ne reprennent pas cette caractéristique, sont inopérants à remettre en cause l’originalité de l’œuvre. Enfin, la décision antérieure du tribunal judiciaire de Paris1 ayant dénié à l’œuvre toute originalité, qui n'a pas été rendue entre les mêmes parties, ne lie pas la cour.
CA Paris, pôle 5, 2e ch., 7 juin 2024, Ze Boîte EURL c. Mme [P] [V] et al., 23/08934 (D20240047)
(Confirmation TJ Paris, 3e ch., 2e sect., 13 août 2021, 21/00602)
1 TJ Paris, 3e ch., 1re sect., 8 févr. 2024, Aphinitea Corporation (venant aux droits de la Sté Ellaechim Trading) et al. c. First Fast Food Collective SAS, 22/02992 (D20240005 ; PIBD 2024, 1225-III-4).
Contrefaçon des dessins et modèles communautaires (non) - Impression visuelle globale différente
Les quatre dessins et modèles communautaires invoqués représentent des captures d’écran d’interfaces d’un jeu vidéo de stratégie, dans lequel le joueur doit conquérir des bases et défendre les siennes. Ce jeu appartient à la catégorie des jeux dit « hyper casual », qui se jouent, durant des sessions courtes, sur un petit écran de téléphone portable ou de tablette. Une interface graphique, obtenue par le biais d’un programme informatique, peut faire l’objet d’une protection au titre d’un dessin ou modèle communautaire si elle a une forme extérieure concrète. Un tel modèle n’offre toutefois qu’une visualisation statique d’une scène éphémère, extraite d’un objet virtuel dynamique, mouvant et animé. Les dessins et modèles en cause représentent notamment des bâtiments composés de formes géométriques simples, de tailles différentes, en trois dimensions, de couleurs différentes, dans un décor périurbain très simple. Des obstacles se trouvent entre certains bâtiments et de petits personnages figurent sur les liaisons reliant les bâtiments. Certaines des caractéristiques revendiquées, reproduites dans des scènes du jeu vidéo incriminé, constituent des traits communs à la catégorie des jeux « relier et conquérir », dans lesquels elles sont récurrentes (bâtiments schématiquement représentés comportant un nombre, chemin de liaison les reliant, emploi de couleurs vives ...). L’utilisateur averti - consommateur qui joue régulièrement à ces jeux - sera donc davantage attentif aux détails, la liberté du créateur étant limitée par le caractère minimaliste des jeux « hyper casual ». Or, cet utilisateur relèvera des différences relatives notamment aux bâtiments, aux obstacles, au décor périurbain, qui ne sont pas mineures. L’impression visuelle globale produite par le jeu incriminé est, par conséquent, différente.
TJ Paris, 3e ch., 1re sect., 27 juin 2024, Voodoo SAS c. Saygames LLC et al., 22/01551 (D20240044)