Jurisprudence
Dessins et modèles

Titularité des droits d’auteur sur un dessin de dentelle initialement exploité par une filiale du même groupe

PIBD 1166-III-7
Cass. com., 16 juin 2021

Action en contrefaçon - Recevabilité - Titularité des droits d’auteur sur le dessin - Personne morale - Présomption de titularité - Exploitation sous son nom - Exploitation non équivoque

Protection du dessin au titre du droit d’auteur - Originalité - Genre - Combinaison - Matière - Effet extérieur

Texte

La société demanderesse invoque un dessin de dentelle, divulgué et commercialisé pour la première fois par une filiale appartenant au même groupe, sous une ancienne référence, puis exploité par elle sous une nouvelle référence. La cour d’appel qui n’était pas tenue par une appréciation de ses droits portée antérieurement lors d'une instance distincte[1], a pu, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, estimer que l’autre filiale avait cessé la commercialisation du dessin et que la société demanderesse justifiait, par plusieurs éléments concordants, d'une exploitation non équivoque de ce dernier sous son nom et sous ses marques verbales française et internationale, antérieurement aux actes de contrefaçon allégués, et qu’elle était dès lors recevable à agir en contrefaçon.

C’est en analysant les pièces produites que la cour d’appel a jugé que le dessin de dentelle revendiqué, caractérisé par une combinaison de deux compositions florales différentes, était original. Elle a relevé que le créateur avait fait le choix de proposer une densité du tissage des motifs floraux en contraste avec un aspect plus léger de l'espace en bordure de fleur, renforçant ainsi l'effet de contraste, ainsi que des tissages et maillages différents pour chaque élément composant les fleurs et le feuillage du modèle. Elle a constaté qu’aucune des dentelles relevant du même genre, versées aux débats par la société défenderesse, ne présentait dans une même combinaison les compositions florales revendiquées.

Cour de cassation, 1re ch. civ., 16 juin 2021, R 19-24.631 (D20210034)
Fashion B. Air SA c. Dentelle Sophie Hallette SAS

(Rejet du pourvoi c. CA Paris, pôle 5, 2e ch., 20 sept. 2019, D20190035)

[1] CA Paris, pôle 5, 1re ch., 29 janv. 2019, 2017/05619, D20190004, PIBD 2019, 1112, III-144. Dans cette affaire opposant la société Dentelle Sophie Hallette à la société René Derhy Import Export, dans laquelle la première revendiquait la titularité de droits d’auteur sur le dessin de dentelle invoqué en l’espèce, également divulgué pour la première fois par la société Richers Marescot, la première chambre du pôle 5 de la cour d’appel de Paris avait opté pour une solution différente de celle retenue par la deuxième chambre dans l’arrêt attaqué. Elle avait déclaré la société Sophie Hallette irrecevable à agir au titre de la contrefaçon du dessin de dentelle car elle ne pouvait se prévaloir de la présomption de titularité des droits d'auteur. Elle considérait que la persistance de l'usage du nom de la société Richers Marescot et de la référence initiale, moins de deux années avant les faits de contrefaçon allégués et alors que cette société poursuivait son activité dans le même domaine, révélait une équivoque quant à la détermination de la personne morale exploitant le dessin de dentelle revendiqué. Voir également, CA Paris, pôle 5, 2e ch., 20 nov. 2020, Dentelle Sophie Hallette c. H&M, 2019/06739, D20200030, PIBD 2021, 1152, IIIM-6.