Jurisprudence
Brevets

Validité d'un brevet européen - Appréciation de l’activité inventive à partir de l’état de la technique le plus proche

PIBD 1158-III-3
CA Paris, 19 janvier 2021

Validité du brevet européen (non) - Activité inventive - État de la technique pertinent - Exécution par l'homme du métier - Problème à résoudre

Texte

Afin d'apprécier le caractère inventif d’une invention, il faut déterminer si, eu égard à l'état de la technique, l'homme du métier, au vu du problème que celle-ci prétend résoudre, aurait obtenu la solution technique revendiquée par le brevet en utilisant ses connaissances professionnelles et en effectuant de simples opérations d’exécution. L’état de la technique le plus proche à sélectionner doit être pertinent, c'est-à-dire qu'il doit correspondre à une utilisation semblable et appeler le moins de modifications structurelles et fonctionnelles pour parvenir à l'invention revendiquée. Il doit donc viser à atteindre le même objectif ou à obtenir le même effet que l'invention, ou au moins appartenir au même domaine technique ou à un domaine étroitement lié. L'article 56 de la CBE n'exige pas, pour déterminer si un brevet procède ou non d'une activité inventive, de procéder par une approche problème-solution supposant de définir au préalable un état de la technique le plus proche du brevet attaqué. Cette approche est propre à la chambre de recours de l'OEB et ne s'impose pas aux juridictions françaises.

En l'espèce, l’invention couverte par le brevet contesté concerne un système d’aération d’un bâtiment d'élevage porcin qui combine des cheminées et des moyens de régulation des flux de l'air, afin de permettre une aération harmonieuse de l'ensemble du bâtiment. L'homme du métier était capable, par la combinaison directe des enseignements des brevets antérieurs cités - ayant trait au même domaine de l'aération d'une stabulation -, de résoudre le problème auquel se propose de répondre l'invention. En effet, à partir d’un brevet suisse, qui constitue l'état de la technique le plus proche, l'homme du métier, par de simples manipulations techniques et au vu de ses connaissances générales, pouvait y associer les enseignements de deux autres brevets européens antérieurs cités. L'activité inventive découle directement des enseignements de ces deux derniers brevets. Ainsi, la revendication 1 du brevet litigieux constitue une juxtaposition de ces inventions et moyens connus, et non une combinaison aboutissant à une fonction nouvelle essentielle. La revendication 2 dépendante est enseignée par le premier brevet européen cité et les caractéristiques décrites par les revendications 3 et 4 sont des techniques courantes, issues des connaissances générales de l'homme du métier. Ces revendications sont donc nulles pour défaut d’activité inventive.

Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 19 janvier 2021, 18/28089 (B20210005)
I-Tek SASU c. Heughebaert Danièle et Philippe EARL
(Confirmation TGI Paris, 3e ch., 3e sect., 9 nov. 2018, 16/17382 ; B20180150)