Contrefaçon de la marque tridimensionnelle - Forme du produit - Imitation - Identité des produits - Similitude des signes - Risque de confusion - Famille de marques
Atteinte à la renommée des marques tridimensionnelles - Marque de renommée - Appréciation globale des éléments pertinents - Ancienneté de l’exploitation de la marque - Exploitation sous une forme modifiée - Altération du caractère distinctif - Investissements promotionnels - Part de marché
Lorsque la marque et le signe en conflit présentent une certaine similitude, l'appartenance de la marque à une famille de marques est un élément dont il convient de tenir compte aux fins de l'appréciation du risque de confusion. Dans ce cas, en effet, ce risque résulte du fait que le consommateur peut se méprendre sur la provenance ou l'origine des produits ou services couverts par le signe litigieux et estimer, à tort, que ce dernier fait partie de cette famille de marques.
La cour d’appel a rejeté la demande en contrefaçon de la marque tridimensionnelle représentant un biscuit au chocolat dénommé « Mikado ». Après avoir comparé cette marque et l'apparence du biscuit litigieux, elle a retenu que, nonobstant l'identité des produits concernés, la faible similitude entre la marque et le signe en cause, pris dans leur ensemble, excluait tout risque de confusion pour le consommateur d'attention moyenne. Elle a énoncé que si l'appartenance à une famille de marques était susceptible de renforcer le risque de confusion, encore fallait-il que celui-ci soit caractérisé. En statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la marque prétendument contrefaite n'appartenait pas à une famille de marques et, à supposer que tel soit le cas, sans prendre en compte cette circonstance aux fins de l'appréciation du risque de confusion, alors qu'elle avait constaté une certaine similitude, fût-elle faible, entre la marque et le signe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Pour rejeter la demande fondée sur l’atteinte à la renommée des marques tridimensionnelles représentant les biscuits au chocolat dénommés « Mikado » et « Mikado King Choco », la cour d’appel a dit que les sociétés demanderesses n’établissaient pas la renommée de leurs marques.
Doit notamment être pris en compte pour apprécier si une marque est renommée l'usage de la marque sous une forme qui diffère par des éléments n'altérant pas son caractère distinctif de celle sous laquelle la marque a été enregistrée, la représentation bidimensionnelle d'une marque tridimensionnelle pouvant notamment faciliter la connaissance de la marque par le public pertinent lorsqu'elle permet de percevoir les éléments essentiels de la forme tridimensionnelle du produit.
La cour d’appel a notamment retenu que l'exploitation ancienne sur des emballages des produits de la marque figurative représentant le biscuit « Mikado » n'était pas de nature à établir l'ancienneté de l'exploitation de la marque tridimensionnelle en cause, mais que cette exploitation révélait, au contraire, la volonté des sociétés demanderesses d'entretenir la confusion entre cette dernière marque et le biscuit Mikado et /ou les marques verbales ou semi-figuratives Mikado, Lu ou Glico, étrangères au litige. Elle a dit que les mêmes motifs s'appliquaient à la seconde marque tridimensionnelle représentant le biscuit « Mikado King Choco » s'agissant de ses conditions d'exploitation sur les paquets de biscuits Mikado sous une forme qui n'est pas celle qui fait l'objet de la marque tridimensionnelle. Elle a également retenu que l'étude réalisée sur le biscuit Mikado « classique », et non à partir de la marque tridimensionnelle, n'était pas davantage pertinente pour démontrer la notoriété de cette marque.
En statuant ainsi, la cour d’appel s’est déterminée par des motifs impropres à exclure l'usage, avant et depuis leur enregistrement, des marques tridimensionnelles sous une forme qui diffère par des éléments n'altérant pas leur caractère distinctif de celle sous laquelle les marques ont été enregistrées. Ces motifs sont, par conséquent, impropres à écarter cet usage comme insusceptible de rapporter la preuve de la renommée des mêmes marques. Elle n’a pas davantage justifié en quoi l'étude réalisée sur le biscuit Mikado était dépourvue de pertinence aux fins d'apprécier la renommée de la marque constituée de l'apparence tridimensionnelle de ce biscuit.
La cour d’appel a ensuite retenu que les budgets publicitaires et campagnes de communication dont il était fait état démontraient tout au plus le succès commercial du produit mais nullement la renommée de la marque. Elle n’a pas précisé pour quelles raisons ces éléments consacrés à la promotion, en France, de la marque tridimensionnelle n'étaient pas pertinents aux fins d'apprécier sa renommée.
Enfin la cour d’appel n’a pas pris en considération, ainsi qu'il lui était demandé, le volume des ventes et la part de marché des biscuits Mikado commercialisés sous cette marque, alors que la part de marché détenue par une marque est un élément pertinent aux fins d'apprécier si celle-ci est renommée.
Le juge doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause en recherchant si, pris dans leur globalité, ils démontrent que la marque jouit d'une renommée. La cour d'appel a privé sa décision de base légale en examinant séparément chacun des éléments présentés au soutien de la demande et en retenant qu'aucun ne rapportait la preuve de la renommée.
Cour de cassation, ch. com., 27 mai 2021, B 18-17.760 (M20210129)
Générale Biscuit Glico France SA, Mondelez France SAS et Mondelez Europe GmbH c. Griesson de Beukelaer GmbH & Co. KG et Solinest SAS
(Cassation partielle CA Paris, pôle 5, 2e ch., 9 mars 2018, 16/24260 ; M20180111 ; PIBD 2018, 1093, III-302)