Opposition au brevet d’invention - 1) Description suffisante (oui) - Exécution par l’homme du métier - 2) Portée du brevet - Nouveauté (oui) - 3) Activité inventive (non) - Revendication 1 - Approche problème-solution - État de la technique - Problème technique objectif - Connaissances générales de l’homme du métier
Requête principale - Modification de la revendication 1 - Nouveauté (oui) - Activité inventive (non) - Rejet
Requête subsidiaire 5 ter - Admissibilité (oui) - Phase orale - Principe du contradictoire - Revendication 1 modifiée - Combinaison de caractéristiques - Nouveauté (oui) - Activité inventive (oui) - Maintien du brevet sous une forme modifiée
L’opposition contre le brevet français intitulé « Composition pour matériau de construction à base de métakaolin, procédé de fabrication associé et utilisation pour la réalisation d’éléments de constructions » est reconnue justifiée.
Le brevet décrit une composition destinée aux matériaux de construction destinée notamment à la réalisation de revêtement de sols, murs ou toitures, d’éléments de construction préfabriqués ou de modules d’isolation, de colle ou mastics minéraux.
L’opposant a demandé la révocation totale du brevet sur les fondements suivants : insuffisance de l’exposé, défaut de nouveauté et défaut d’activité inventive.
La description du brevet indique plusieurs exemples de compositions conformes à l’invention, ainsi que leur utilisation pour fabriquer des matériaux de constructions variées. Elle fournit au moins un mode de réalisation de l’invention et indique les différentes conditions de mises en œuvre de celle-ci. L’homme du métier, qui en l’espèce est un spécialiste des géopolymères et des ciments dans le domaine de la construction, interprète les revendications avec la volonté de comprendre. Il est donc capable à la lumière de la description de comprendre comment adapter la composition pour qu’elle soit utilisée comme matériau de construction.
Par conséquent, l’homme du métier, grâce à l’enseignement du brevet et sans effort excessif, est capable de réaliser l’invention. Il en résulte que l’invention est exposée de façon suffisamment claire et complète et que ce motif d’opposition n’est pas fondé.
Pour apprécier la nouveauté de l’objet des revendications, il apparait nécessaire d’interpréter en amont certains termes et expressions des caractéristiques de la revendication n°1 afin de définir les limites exactes de l’objet revendiqué dans le but de pouvoir le comparer avec l’état de la technique.
L’utilisation du terme « majoritairement » et de termes différents pour définir le type de métakaolin, tels que « métakaolin », « métakaolin flashé », « métakaolin non flashé », dans les revendications n°1, 6 et 7 engendre une incohérence pour l’homme du métier dans l’interprétation la plus large de l’objet des revendications. Il ne semble pas évident que le métakaolin prévu en proportion d’au moins 20% soit spécifiquement le métakaolin flashé ou le métakaolin non flashé, ni même une combinaison des deux métakaolins à la lumière de la description. Pour l’homme du métier, il existe donc 2 interprétations possibles engendrant une ambiguïté pour définir l’objet exacte des revendications.
Une objection de clarté ne peut être soulevée en tant que motif d’opposition en vertu de l’article L. 613-23-1 du CPI. Néanmoins lorsque l’objet des revendications contient une ambiguïté, une imprécision ou une contradiction ne permettant pas de déterminer exactement l’étendue de la protection conférée par les revendications, même à la lumière de l’enseignement du brevet contesté dans son ensemble, il appartient au titulaire de proposer une interprétation convaincante. L’absence de réponse du titulaire de brevet sur ce point impose d’interpréter la revendication de la façon la plus large possible réunissant les deux interprétations.
À la lumière de la description, l’homme du métier comprend que le métakaolin flashé doit au moins être strictement supérieur à 20% dans la matrice pour être conforme à l’invention revendiquée.
Sur l’interprétation des termes « métakaolin flashé », il convient de rappeler qu’une caractéristique de procédé contenue dans une revendication de produit doit conférer des propriétés techniques différentes de celles des produits connus de l'état de la technique pour qu’elle soit considérée comme distinctive, ce qu’il appartient au titulaire de démontrer. À cet effet, le titulaire doit apporter la preuve qu’il existe de nettes différences dans les propriétés des produits ainsi obtenus.
En l’espèce, la description n’indique pas les propriétés permettant de différencier les métakaolins issus de procédés différents mais seulement les effets techniques qui semblent découler de ses propriétés. A l’examen d’un des documents fournis au cours de la procédure, il apparait que les métakaolins peuvent être différenciés selon leur procédé d’obtention et que celui-ci leurs confère des propriétés particulières au niveau de leur morphologie. Il en découle que le procédé de calcination flash revendiqué confère des propriétés techniques particulières au produit obtenu. Cette caractéristique technique est donc limitative.
Sur l’appréciation de la nouveauté, au regard des éléments présentés, l’objet des revendications visées par ce motif d’opposition, est nouveau.
En revanche, l’objet de la revendication indépendante n°1 n’implique pas d’activité inventive.
En effet, le document D1, qui vise à résoudre le même problème technique que l’invention, peut être considéré comme l’état de la technique le plus proche. L’objet de la revendication n°1 diffère de ce document en ce que la caractéristique (b11) « le métakaolin est un métakaolin « flashé », obtenu par calcination flash d'une argile en poudre à une température comprise entre 600 et 900 °C pendant quelques secondes suivie d'un refroidissement rapide » n’est pas divulguée. D’après la description, l’effet technique de cette différence consiste à obtenir une composition dont le besoin en eau est moindre tout en restant comparable aux produits existant en ce qui concerne la résistance à la compression.
Le problème technique objectif que vise à résoudre l’invention, selon le titulaire, est de fournir une composition plus écologique pour un matériau de construction ayant une résistance mécanique comparable. Cependant, à la lumière d’un document cité par l’opposant, un métakaolin flash tel que défini par l’objet de la revendication, a un besoin en eau plus élevé alors qu’il est également obtenu par un procédé de calcination flash. Par conséquent, l'objet revendiqué ne résout pas le problème technique allégué dans toute sa portée. Ainsi, le problème technique objectif doit être redéfini comme étant de fournir une composition écologique alternative.
L’homme du métier, incité à consulter le document D23, serait parvenu à l’objet de la revendication n°1 en partant du document D1.
Dès lors, le brevet ne peut pas être maintenu tel que délivré.
Dans le cadre de la procédure d’opposition, le titulaire du brevet contesté a la faculté de modifier les revendications du brevet sous réserve que le nouveau jeu de revendications soit conforme à l’article L. 613-23-3 du CPI. Or, l’objet de la revendication n°1 de la requête principale proposée par le titulaire n’implique pas d’activité inventive. Elle est rejetée.
La requête subsidiaire 5 ter déposée le jour de la phase orale, après l’expiration du dernier délai prévu par l’article R. 613-44-6 3° du CPI, est acceptée dès lors que le principe du contradictoire a été respecté. En effet, celle-ci consiste seulement en la fusion de revendications du jeu tel que délivré qui ont été visées par l’opposant dans le mémoire d’opposition.
L’objet de la revendication n° 1 diffère des documents considérés comme pouvant être un état de la technique le plus proche par au moins deux caractéristiques techniques distinctives. Le titulaire fait valoir que les caractéristiques techniques objet de la revendication n°1 sont intimement liées et concourent à l’amélioration de la résistance mécanique des matériaux de construction réalisés à partir de la composition, ce que l’opposant conteste mais sans étayer suffisamment son argumentation.
Par conséquent, il est crédible pour l’homme du métier, à partir de l’enseignement du brevet, de considérer que les caractéristiques techniques de l’objet de la revendication n°1 ont une interaction fonctionnelle entre elles produisant un effet technique combiné différent de celui qu’elles produiraient individuellement. Dans ces conditions, les trois caractéristiques, prises en combinaison avec les autres caractéristiques de l’objet de la revendication 1, concourent au même effet technique ou ont un effet technique de synergie, à savoir l’amélioration de la résistance à la compression.
Le problème technique objectif que se propose de résoudre l’invention est de fournir une composition écologique dont la résistance à la compression du matériau obtenu par extrusion à basse température est améliorée.
Aucun document versé au cours de la procédure pris en combinaison avec les documents de l’état de la technique n’incite l’homme du métier à obtenir l’objet des revendications dans le but d’améliorer la résistance mécanique du matériau de construction voulu.
Ainsi, la requête subsidiaire 5ter du titulaire est conforme à l’article L. 613-23-3 du CPI, permettant au brevet d’être maintenu sous une forme modifiée.
Décision INPI, 23 janvier 2023, OPP21-0010 (OB20210010)
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