Rejet d’une demande de CCP - Médicament - Produit - Droit de l'UE - Principe actif - Excipient - Composition de principes actifs - 1re AMM pour le produit
C'est à juste titre que la demande de CCP portant sur la combinaison « Rituximab et hyaluronidase humaine recombinante » pour le traitement du cancer du sein a été rejetée.
Selon l'article 3, d), du règlement (CE) n° 469/2009 concernant le CCP pour les médicaments, tout produit - défini à l'article 1, b), comme un principe actif ou une composition de principes actifs d'un médicament - protégé par un brevet, peut faire l'objet d'un CCP s'il a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) qui est la première AMM de ce produit, en tant que médicament.
Les notions de « principe actif » et de « composition de principes actifs » ne sont pas définies par ledit règlement. Il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de l'article 1, a), 3 bis de la directive 2011/62/UE du 8 juin 2011, modifiant la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, qu’une substance active se rapporte à une substance produisant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique propre. Par ailleurs, le point 3 ter du même article définit un excipient comme « tout composant d'un médicament, autre qu'une substance active et les matériaux d'emballage ». Il en résulte qu’un excipient ne constitue pas un principe actif au sens de l’article 1, b), du règlement CE n°469/2009.
En l’espèce, l’hyaluronidase humaine recombinante (rHuPH20) est désignée expressément comme un excipient dans le résumé des caractéristiques du produit annexé à l'AMM (RCP), ainsi que dans le rapport d’évaluation se rapportant à la procédure d’AMM. C’est à tort que la requérante prétend que, dès lors que le règlement ne conditionne pas la protection par un CCP à la présentation de la substance en cause comme un principe actif dans l'AMM correspondante, il importe peu que la hyaluronidase humaine recombinante soit présentée comme un excipient dans l'AMM. Il résulte au contraire de l'article 4 du règlement que la protection conférée par le certificat s'étend au seul produit couvert par l'AMM du médicament correspondant. Par ailleurs, il ne ressort pas de la jurisprudence de la Cour de justice (Bayer, 19 juin 2014, C-11/13 ; Forsgren, 15 janvier 2015, C-631/13), qu'il n'y a pas lieu de tenir compte, pour la définition du produit objet du CCP, des qualifications contenues dans l'AMM et le RCP qui y est annexé relatives aux caractéristiques du médicament correspondant au produit fondant la demande de CCP. Notamment, l'arrêt Bayer ne permet pas d'alléguer que la caractérisation d'une substance dans l'AMM est indifférente pour l'appréciation de la notion de produit au sens du règlement, la nature de l'isoxadifène, objet de la demande de CCP dans ledit arrêt, n'étant pas mentionnée dans l'AMM.
Malgré les termes clairs de l’AMM dont la validité n’est pas contestée et du rapport d’évaluation, la requérante a produit des documents pour tenter de démontrer que la rHuPH20 aurait cependant un effet thérapeutique propre. Ces documents ne caractérisent pas, en tout état de cause, des éléments scientifiques pertinents établissant un effet pharmacologique, immunologique ou métabolique propre de la rHuPH20 pour le traitement en particulier des lymphomes non-hodgkiniens. La requérante ne justifie pas davantage d'un effet physiologique de l'hyaluronidase en association avec le rituximab. L’excipient qu’est la rHuPH20 permet d'accroître les effets thérapeutiques du principe actif en facilitant son absorption et sa dispersion au travers du tissu conjonctif de l'espace sous-cutané. Cela ne permet pas de qualifier la combinaison revendiquée de combinaison de principes actifs au sens de l’article 1, b), du règlement, tel qu’interprété la Cour de justice (Glaxosmithkline, 14 novembre 2013, C-210/13).
Par conséquent, la combinaison du Rituximab et de l’hyaluronidase humaine recombinante n'est pas un produit. Dès lors, le Rituximab ayant déjà fait l'objet de deux AMM antérieures, l'AMM invoquée n'est pas la première pour ce produit.
Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 18 janvier 2022, 20/17731 (B20220009)1
Halozyme Inc. c. INPI
(Rejet recours c. décision INPI, 27 janvier 2020)
1La motivation de la cour d’appel de Paris est dans la droite ligne de la jurisprudence française sur ce sujet (CA Paris, pôle 5, 1re ch., 15 déc. 2020, Halozyme Inc. c. INPI, 18/14332, B20200066, PIBD 2021, 1154, III-2 ; CA Paris, pôle 5, 1re ch., 11 sept. 2013, Lantheus Medical Imaging Inc. c. INPI, 12/14495, B20130136, PIBD 2014, 997, III-3 avec une N.D.L.R.).