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Contrefaçon de la marque (oui) - Risque de confusion - Caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure - Adjonction d’une marque de renommée - Marque ombrelle - Élément commun - Élément distinctif (oui) - Élément dominant (non) - Position distinctive autonome (oui) - Fonction d'indication d'origine
Concurrence déloyale (non) - Atteinte au nom commercial, à l'enseigne et au nom de domaine - Faits non distincts des actes de contrefaçon
Préjudice - Portée territoriale de l'interdiction - Préjudice moral
Nullité partielle de la marque française (oui) - Droit antérieur - Marque - Similarité des produits ou services - Risque de confusion
Il existe un risque de confusion entre la marque verbale DIVINE, qui désigne des produits de parfumerie, et le signe « GAULTIER DIVINE » utilisé sur des emballages et sur le site internet de la société poursuivie pour désigner des produits identiques ou fortement similaires.
Dans son arrêt Thomson Life[1], la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit qu’il n’est pas exclu qu’une marque antérieure, utilisée par un tiers dans un signe composé comprenant la dénomination de l’entreprise de celui-ci, conserve une position distinctive autonome dans le signe composé. Elle a ajouté que dans ce cas, « aux fins de la constatation d’un risque de confusion, il suffit que, en raison de la position distinctive autonome conservée par la marque antérieure, le public attribue également au titulaire de cette marque l’origine des produits ou des services couverts par le signe composé ». Cependant, un élément d’un signe composé ne conserve pas une telle position distinctive autonome si cet élément forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport à celui des éléments pris séparément[2]. Enfin, la Cour de justice[3] a rappelé que « s’il est vrai que le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important, un tel risque n’est pas pour autant exclu lorsque le caractère distinctif de la marque antérieure est faible ».
Il ressort des représentations incriminées que les mots « Gaultier » et « Divine » y sont systématiquement associés, tantôt dans la même taille, tantôt avec une accentuation du mot « Divine » en lettres deux fois plus hautes et occupant la même largeur que le mot « Gaultier » et, dans tous les cas, ils sont accolés. Il s’agit donc d’une représentation unitaire et non de deux signes distincts utilisés à proximité l’un de l’autre, quand bien même le mot « Gaultier » est aussi une marque.
Concernant le caractère distinctif de la marque DIVINE, il est établi un usage courant de l’adjectif « divine » dans les marques désignant les produits de parfumerie, dans le but de conduire le consommateur à faire un lien entre l’usage du parfum et le perfectionnement de sa beauté et sa séduction. Comme retenu dans des décisions de la chambre de recours de l’EUIPO, cet adjectif n’est pas de nature à rendre distinctif un signe l’incluant. Or, le mot « divine », utilisé seul ou associé à un mot sans rapport avec les produits ou services, ne vient plus évoquer la perfection d’un second terme mais redevient arbitraire. Il permet alors d’identifier des produits de parfumerie comme provenant d’une entreprise déterminée, quand bien même il serait évocateur de la fonction du produit. Si les demandeurs démontrent un usage long, constant et ostensible du signe « DIVINE » pour des parfums, ils soutiennent néanmoins eux-mêmes qu’il s’agit de produits de niche, peu connus du grand public et promus par le bouche à oreille. Cette circonstance est donc de nature à conserver au signe sa distinctivité, mais non à lui en conférer une supplémentaire. Ainsi, la marque DIVINE pour désigner des parfums présente un caractère arbitraire qui lui confère un caractère distinctif intrinsèque moyen.
Le signe litigieux consiste en la juxtaposition des mots « Gaultier » et « Divine ». Le premier terme attirera l’attention du public en raison de sa position d’attaque et de sa renommée incontestée, tirée de celle du styliste du même nom et de la marque ombrelle éponyme. La perception du second terme, qui renvoie de façon générale à un attribut de divinité, est affectée par cette très forte distinctivité et ce terme n’est pas dominant. L’absence de combinaison de sens entre les mots « Gaultier » et « Divine », la mise en valeur prépondérante du second mot sur les représentations versées aux débats, son pouvoir distinctif intrinsèque et le fait que le terme « Gaultier » soit également une marque ombrelle font que le mot « Divine » conserve une position distinctive autonome dans le signe litigieux.
La marque antérieure et le signe doté d’une position distinctive autonome dans le signe contesté sont donc identiques. Le public pertinent – constitué du consommateur de parfums en France – moyennement attentif, sera donc enclin à croire que les produits en cause ont une origine commune ou proviennent d’entreprises liées économiquement. La contrefaçon est donc caractérisée.
Par ailleurs, la marque verbale française GAULTIER DIVINE est partiellement annulée pour les produits relevant de la parfumerie et de la cosmétique, en raison de l’atteinte à la marque antérieure DIVINE.
Tribunal judiciaire de Paris, 3e ch., 2e sect., 1er décembre 2023, 23/11158 (M20230262)
M. [Y] [M] et Marketing Beauté Associés SAS c. Puig France SAS
La notion de position distinctive autonome, issue de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, a été invoquée à plusieurs reprises devant les juridictions françaises. Voici quelques décisions récentes traitant de la question dans le cadre d’une action en contrefaçon ou dans celui d’une opposition à enregistrement :
■ Position distinctive autonome :
- CA Paris, pôle 5, 2e ch., 10 févr. 2023, Rent a Car SAS c. Enterprise Holdings France SAS et al., 21/16169 (M20230018 ; PIBD 2023, 1201, III-7 ; D IP/IT, sept. 2023, p. 478, J. Groffe-Charrier ; arrêt rendu sur renvoi après cassation : Cass. com., 7 juil. 2021, 19-16.028, M20210166) ; Contrefaçon - marque verbale RENT A CAR / marque semi-figurative enterprise rent-a-car :
« La cour retient que nonobstant les différences visuelles et phonétiques constatées le public pertinent qui cherche à louer une voiture et qui connaît la société Rent A Car dont la renommée en France en tant que société de location de voiture est reconnue et non contestée retiendra essentiellement le signe RENT A CAR et n'attribuera pas d'importance particulière à l'expression Enterprise à laquelle il n'attachera aucune distinctivité.
Ainsi, et bien que le signe RENT A CAR ne soit pas l'élément dominant du signe complexe contesté, il conserve une position distinctive autonome prégnante et le public sera conduit à croire que les services en cause proviennent d'une même entreprise ou à tout le moins d'une entreprise économiquement liée. » ;
- CA Paris, pôle 5, 1re ch., 9 mars 2022, Piab Aktiebolag SA c. INPI et al., 20/02631 (M20220085) ; Opposition à enregistrement - marque verbale PIAB / demande d’enregistrement de la marque verbale PIAB-BLET :
« Cette impression d'ensemble [faiblement distincte] est encore renforcée par la prise en compte des éléments distinctifs et dominants.
[…]
Ainsi que l'a rappelé la cour de justice de l'Union européenne aux points 28 et 29 de l'arrêt Medion Thomson Life C12/04 du 6 octobre 2005, invoqué par la société PIAB AKTIEBOLAG, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails. Dans le cadre de l'examen de l'existence d'un risque de confusion, l'appréciation de la similitude entre deux marques ne revient pas à prendre en considération uniquement un composant d'une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d'opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n'exclut pas que l'impression d'ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants.
La CJUE a également précisé au considérant 23 de son arrêt BIMBO rendu le 8 mai 2014 que l'impression d'ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe peut, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Toutefois, ce n'est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l'appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l'élément dominant.
Enfin, dans l'arrêt Medion/Thomson Life précité, la Cour a dit qu'il n'est pas exclu qu'une marque antérieure, utilisée par un tiers dans un signe composé comprenant la dénomination de l'entreprise de ce tiers, conserve une position distinctive autonome dans le signe composé. Dès lors, aux fins de la constatation d'un risque de confusion, il suffit que, en raison de la position distinctive autonome conservée par la marque antérieure, le public attribue également au titulaire de cette marque l'origine des produits ou des services couverts par le signe composé. Cependant, un élément d'un signe composé ne conserve pas une telle position distinctive autonome si cet élément forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens desdits éléments pris séparément.
En l'espèce, le terme PIAB est en soi très distinctif pour les produits et services visés, et l'ensemble PIAB-BLET dans le signe contesté n'a pas de sens particulier et ne constitue pas un ensemble ayant un sens différent par rapport aux deux éléments PIAB et BLET pris séparément de sorte que PIAB conserve sa position distinctive autonome dans PIAB-BLET et que le risque de confusion est caractérisé, le consommateur pouvant associer les deux signes, et croire, pour les produits et services identiques ou similaires, que le second est une déclinaison du premier.
Il s'ensuit que le consommateur concerné pourra se méprendre sur leurs origines respectives, et sera conduit à penser que ces signes proviennent d'une même entreprise ou d'entreprises liées économiquement. » ;
- CA Paris, pôle 5, 2e ch., 7 sept. 2018, Socri Ltd c. INPI, 17/11155 (M20180316)[4] ; Opposition à enregistrement - marque verbale SOCRI / demande d’enregistrement de la marque semi-figurative SOCRI REIM REAL ESTATE INVESTMENT MANAGEMENT Créateur de lieux d'exception :
« Que, conceptuellement l'ensemble REAL ESTATE INVESTMENT MANAGEMENT fait référence au domaine immobilier et à la gestion financière comme l'indique elle-même la requérante tandis qu'aucun élément ne permet de retenir que le terme REIM renverra à la ville de Reims comme il est soutenu alors qu'il constitue l'acronyme de cet ensemble, de sorte que ces éléments n'altèrent pas la position distinctive autonome du terme "SOCRI" que le public pertinent gardera en mémoire et qui n'a aucune signification immédiate ; que par ailleurs la mention "Créateur de lieux d'exception" renvoie aux concepts immobiliers originaux que la société Socri Limited dit proposer et apparaît moins attractif du fait de son positionnement et de sa taille ; que ces éléments n'altèrent donc pas la position distinctive autonome du terme "SOCRI" que le public pertinent gardera en mémoire et qui n'a aucune signification immédiate ; qu'enfin ni la présentation dans un cartouche noir ni l'élément figuratif de petite taille n'altèrent plus ce caractère immédiatement perceptible et dominant de l'élément verbal SOCRI ;
Qu'il suit que l'impression d'ensemble qui se dégage du signe "SOCRI REIM REAL ESTATE INVESTMENT MANAGEMENT Créateur de lieux d'exception" est propre à générer un risque de confusion avec la marque SOCRI dans l'esprit du public concerné qui sera conduit, en raison de l'ensemble de ces éléments, combiné à l'identité ou à la similarité des services en cause, à confondre ou, à tout le moins, à associer les deux signes et à leur attribuer une origine commune en considérant que le signe contesté constitue une déclinaison de la marque première. » ;
■ Absence de position distinctive autonome :
- TJ Paris, 3e ch., 1re sect., 11 mai 2023, Jin Hui SAS et al. c. GW Hotel SASU et al., 21/14390 (M20230131 ; PIBD 2023, 1211, III-6) ; Contrefaçon - marque verbale le galanga / marque verbale GALANGA BY MONSIEUR GEORGE :
« 32. Certes, le terme "galanga" qui compose la marque antérieure se retrouve dans la marque seconde en position d'accroche, à laquelle le consommateur accorde traditionnellement une attention plus importante. Cependant, ainsi que le soulignent justement les défenderesses, ce terme est défini dans le dictionnaire Larousse cuisine comme "un cousin du gingembre - d'ailleurs on le dénomme parfois 'gingembre de Siam', le galanga est un rhizome très aromatique et poivré, citronné mais légèrement amer. En Thaïlande ou au Cambodge, il est utilisé pour parfumer les currys ou les soupes". Dès lors, en sa qualité d'épice utilisée en particulier dans la cuisine asiatique, il constitue un terme évocateur de cette cuisine du monde, et ne peut que conférer à la marque première déposée, une faible distinctivité pour désigner un service de restauration asiatique. Il en résulte que dans la marque seconde, le signe "galanga" perd sa position distinctive autonome au profit des termes "by Monsieur George", dont la société H6 Signature démontre qu'ils sont au contraire arbitraires pour désigner les services concernés, et constituent l'élément dominant de cette marque composée.
33. Les termes "by Monsieur George" mettent par ailleurs en évidence l'origine du service proposé comme un élément "signature", ce qui permet également de différencier sur le plan conceptuel la marque de la société HN6 Signature de la marque première, qui ne fait que référence à l'épice précitée.
34. Au regard de l'ensemble de ces considérations, le tribunal retient que les signes en cause présentent de nettes différences tant sur les plans phonétiques et visuels que conceptuels, si bien qu'un risque de confusion dans l'esprit du public pertinent d'attention moyenne apparaît exclu, le consommateur concerné étant en mesure de différencier l'origine des services couverts par les deux marques. » ;
- CA Paris, pôle 5, 1re ch., 9 nov. 2022, Apple Inc. c. INPI et al., 20/13921 (M20220317 ; PIBD 2023, 1199, III-6) ; Opposition à enregistrement - marque verbale APPLE / demande d’enregistrement de la marque verbale Pen Pineapple Apple Pen :
« Cette impression d'ensemble [différente] est encore renforcée par la prise en compte des éléments distinctifs et dominants. Ainsi, si le terme APPLE est distinctif au regard des produits et services en cause, il ne peut être considéré, au sein du signe contesté, comme dominant et individualisable. En effet, comme l'a retenu l'INPI, il se trouve fondu dans un ensemble où il n'est pas mis en exergue par rapport aux autres termes, étant placé en troisième position, entouré des séquences PEN PINEAPPLE et PEN. Le terme APPLE ainsi situé au milieu d'un ensemble de quatre termes ne retiendra pas davantage l'attention du consommateur qui aura tendance au contraire à se focaliser sur l'entame et la finale du signe marqué par la répétition du terme PEN.
Enfin, le caractère arbitraire objectif de la marque première pour désigner les produits en cause ne peut suffire à faire naître un risque de confusion entre les signes en présence dès lors, comme l'a justement relevé l'INPI, qu'ils présentent des différences intrinsèques prépondérantes, exclusives de tout risque de confusion ou d'association.
Ainsi, c'est à juste titre que l'INPI a retenu que le terme "APPLE" ne retiendra pas, à lui seul, dans le signe contesté l'attention du consommateur des produits et services en cause au sein du signe contesté, ce dernier étant perçu dans sa globalité.
En outre, si la notoriété de la marque antérieure APPLE n'est pas contestée dans le domaine des nouvelles technologies, elle ne peut compenser les différences prépondérantes existant entre les signes en cause, la notoriété d'une marque ne constituant qu'un facteur aggravant du risque de confusion.
Par ailleurs, si la société APPLE soutient que le terme APPLE occupe une position distinctive autonome dans le signe contesté, la cour rappelle que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, outre qu'un élément d'un signe composé ne conserve pas une position distinctive autonome si cet élément forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens desdits éléments pris séparément» (CJUE, arrêt du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C-591/12 P, point 25). Dans le cadre de l'examen de l'existence d'un risque de confusion, l'appréciation de la similitude entre deux marques ne revient ainsi pas à prendre en considération uniquement un composant d'une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d'opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble.
Or, au cas présent rien n'établit, comme déjà relevé, que dans la marque PEN PINEAPPLE APPLE PEN, le terme APPLE conserve une position distinctive autonome au regard de la répétition de la séquence du mot court PEN, encadrant les termes PINEAPPLE et APPLE perçus alors comme deux fruits, et non en référence à la marque de la société éponyme, et formant au contraire une suite de mots présentant une certaine forme de logique et de cohérence.
[…]
Il résulte en conséquence de la comparaison globale des signes en présence, en tenant compte de l'ensemble des critères pertinents au cas d'espèce, en ce compris leurs éléments distinctifs et dominants que, nonobstant l'identité ou la similarité de certains des produits et services visés, leurs dissemblances sur les plans visuel, phonétique et conceptuel n'entraînent aucun risque de confusion pour le consommateur concerné par les produits et services désignés, d'attention moyenne, normalement informé, raisonnablement attentif et avisé, qui ne pourra se méprendre sur leur origine respective, et ne sera pas conduit, au vu des différences relevées, à penser que ces signes proviennent d'une même entreprise ou d'entreprises liées économiquement, ou à percevoir le signe contesté comme la déclinaison de la marque antérieure » ;
- CA Paris, pôle 5, 2e ch., 3 juin 2022, Brandessence Ltd c. INPI et al., 21/12447 (M20220182 ; PIBD 2022, 1192, III-3 ; Propr. industr., janv. 2023, p. 21, P. Tréfigny) ; Opposition à enregistrement - marque verbale ORIGIN / demande d’enregistrement de la marque verbale ORIGINE 1927 :
« Si le terme ORIGIN présente un caractère distinctif eu égard aux boissons alcooliques ou non désignées dans la marque antérieure, il n'en demeure pas moins que ce terme appliqué à ces produits sera perçu par le public concerné comme très évocateur de la provenance, des racines, du point de départ et apparaît donc faiblement distinctif.
[…]
Enfin, intellectuellement, si les signes en présence renvoient à l'idée de provenance, de racine ou de commencement, dans le signe contesté, le terme ORIGINE loin d'être mis en exergue, se fond dans un ensemble composé d'une expression autonome dans laquelle l'idée de provenance est étroitement associée à la date ancienne à laquelle elle est associée renvoyant à l'histoire, concept absent de la marque antérieure, ce quand bien même le public moyen qu'il convient de prendre en considération n'appréhende pas cette année comme celle de la loi qui a fixé l'aire de délimitation de l'appellation d'origine Champagne, le terme ORIGINE perdant ainsi sa position distinctive autonome dans un ensemble conceptuellement différent, malgré sa situation en début d'expression. A cet égard, la société requérante conteste à tort le caractère arbitraire du nombre 1927 qui s'il peut renvoyer à la notion de millésime pour certains produits tels les vins, n'en demeure pas moins étroitement associé au terme ORIGINE dont la requérante invoque le caractère hautement distinctif, pour former un tout constituant une expression arbitraire.
Aussi, les ressemblances ci-avant relevées sont insuffisantes à caractériser un risque de confusion ou d'association pour le public entre les signes en présence, celui-ci ne pouvant considérer que la marque seconde est une déclinaison de la marque antérieure et rattacher les deux marques à une origine commune, ce malgré l'identité et la similarité des produits en présence. » ;
- CA Paris, pôle 5, 1re ch., 7 sept. 2021, Cisco Technology Inc. c. INPI et al., 19/03899 (M20210190) ; Opposition à enregistrement - marque verbale SMARTNET / demande d’enregistrement de la marque verbale SmartNet FOLAN :
« Les deux signes présentent donc des différences tant visuelle, que phonétique et conceptuelle.
[…]
La société Cisco prétend cependant que la reprise du terme "SMARTNET" au sein de la demande de marque contestée crée un risque de confusion entre les signes, compte tenu de son caractère distinctif pour les produits visés. Il vient cependant d'être démontré que le consommateur concerné percevra le terme "SMARTNET" comme évoquant un réseau intelligent de type internet, de sorte que ce terme est faiblement distinctif pour les services en cause de réparation de matériel informatique utilisant des réseaux, relevant de l'informatique et des télécommunications, et qu'étant doté d'un faible pouvoir distinctif, il n'a pas une position distinctive autonome, au sens de la jurisprudence Thomson Life de la CJUE invoquée par la société Cisco, dans le signe contesté, lequel se distingue par l'adjonction du terme "FOLAN", qui est fortement distinctif pour le consommateur des services visés, et n'a au surplus pas de renommée particulière, situation différente de la jurisprudence Thomson Life susvisée.
Il résulte en conséquence de la comparaison globale des signes en présence, en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants, et en particulier de la faible distinctivité de la marque antérieure pour les services visés, que les différences entre les signes excluent tout risque de confusion.
Il s'ensuit que, malgré la similarité des produits et services en cause, le consommateur concerné par ces services ne pourra se méprendre sur leurs origines respectives, et ne sera pas conduit, au vu des différences relevées, à penser que ces signes proviennent d'une même entreprise ou d'entreprises liées économiquement. » ;
- Cass. com, 14 nov. 2018, Ecolab USA Inc. c. INPI et al., 17-24.086 (M20180450 ; PIBD 2018, 1106, III-771 ; Propr. industr., févr. 2019, p. 37, P. Tréfigny ; Rejet pourvoi c. CA Paris, pôle 5, 1er ch., 25 avr. 2017, 16/17645, M20170225, PIBD 2017, 1074, III-477 ; arrêt rendu sur renvoi après cassation : Cass. com., 21 juin 2016, 14-25.344, M20160309, PIBD 2016, 1055, III-659, Propr. intell., 61, oct. 2016, p. 46) ; Opposition à enregistrement - marque verbale ECOLAB / demande d’enregistrement de la marque verbale KAIROS ECOLAB :
« Mais attendu qu'ayant relevé que les signes en présence ont en commun le terme "Ecolab", le signe contesté "Kairos Ecolab" étant constitué par la juxtaposition de la dénomination de la société Kairos et de la marque antérieure enregistrée, et retenu que, si le terme "Ecolab" est doté d'un caractère distinctif propre évoquant un laboratoire écologique, cependant, le terme "Kairos", parfaitement arbitraire, qui reprend la dénomination sociale de la société éponyme et se trouve placé en position d'attaque, a une valeur sémantique importante qui s'ajoute à celle du terme "Ecolab" pour former un ensemble conceptuellement différent de la marque antérieure renvoyant au laboratoire écologique de la société Kairos, précisément identifié, de sorte qu'il constitue une unité ayant un sens différent par rapport au sens des dits éléments pris séparément, c'est sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations que la cour d'appel, qui a en outre constaté que ces signes se différenciaient visuellement, par leur longueur et leur composition, et phonétiquement, par leur rythme et leurs sonorités d'attaque, en a déduit que le consommateur moyennement attentif ne serait pas amené à croire que le signe contesté serait la déclinaison ou l'adaptation de la marque antérieure et qu'il n'existait donc pas de risque de confusion entre les signes en cause ; que le moyen n'est pas fondé. » ;
- CA Paris, pôle 5, 1re ch., 6 mars 2018, Victoire SAS c. INPI et al., 17/15521 (M20180109 ; PIBD 2018, 1093, III-308 ; v. également 17/15596 ; M20180110) ; Opposition à enregistrement - marque verbale VICTOIRE / demande d’enregistrement de la marque verbale victoire may :
« Il sera relevé que la société VICTOIRE fait état de l'ancienneté de sa marque, mais ne peut se fonder sur ses propres éléments de communication pour justifier qu'elle bénéficierait d'une particulière notoriété et que le signe la constituant aurait ainsi un caractère distinctif élevé.
Le terme victoire étant un prénom, il apparaît lorsqu'il est associé au terme may comme partie d'un ensemble constituant un ensemble patronymique complet, dans lequel il ne dispose pas d'une position distinctive autonome, au même titre que le terme may, ces deux termes apparaissant alors comme respectivement les prénom et nom d'une personne.
La prise en considération de leur place ou de leur longueur respective ne peut révéler l'importance du terme victoire ou le caractère secondaire du terme may, ce d'autant plus que ce dernier est le seul à permettre d'établir l'appartenance d'une personne à une famille.
Il n'existe donc pas de raison pour que le consommateur confère au terme victoire une attention particulière lorsqu'il considère la marque victoire may.
Dès lors, la société VICTOIRE ne peut soutenir utilement que le consommateur percevra le signe victoire may comme une déclinaison de la marque antérieure VICTOIRE utilisée pour désigner une collection capsule ou consacrée à des vêtements de printemps, et il n'est pas établi un risque d'association dans l'esprit du public entre les deux marques. ».
[1] CJCE, 2e ch., 6 oct. 2005, Medion AG, C-120/04 ; PIBD 2005, 819, III-695 ; Propr. industr., janv. 2006, p. 15, A. Folliard-Monguiral.
[2] CJUE, 2e ch., 8 mai 2014, Bimbo SA, C-591/12.
[3] CJUE, gde ch., 8 nov. 2016, BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH, C-43/15.
[4] V. également, dans le même sens, plusieurs décisions rendues par la même juridiction le même jour mettant en cause des signes postérieurs différents : 17/11157, M20180317 ; 17/11153, M20180315 ; 17/11143, M20180313 ; 17/11137, M20180312 ; 17/11156, M20180319.