Contrefaçon de la marque semi-figurative - Imitation - Substitution de la partie verbale - Différence phonétique et intellectuelle - Similitude visuelle - Structure du logo et typographie identiques - Impression d'ensemble - Risque de confusion - Conditions d'exploitation
Parasitisme - Fait distinct des actes de contrefaçon - Volonté de s'inscrire dans le sillage d'autrui, de profiter de ses investissements et de sa notoriété
Le risque de confusion entre des signes en litige doit s'apprécier globalement, par référence au contenu de l'enregistrement de la marque, sans tenir compte des conditions de son exploitation[1].
La cour d’appel a retenu la contrefaçon de la marque semi-figurative PALLADIUM par le signe « Yangbokai ». Elle a d’abord constaté que les signes ne présentaient aucune ressemblance aux plans phonétique et conceptuel et estimé qu'au plan visuel, lorsqu'ils étaient observés à une distance supérieure à 20 cm, comme c'est le cas des chaussures, qu'elles soient portées ou disposées sur les rayonnages ou dans la vitrine d'un magasin, une similitude apparaissait entre les inscriptions « Palladium » et « Yangbokai », dont elle a relevé qu'elles étaient toutes deux en relief et formées d'une sorte de caoutchouc posé sur un socle de la même couleur. La cour d’appel a ensuite procédé à la comparaison de chacune des séquences de lettre, pour en déduire une impression visuelle très proche qui, ajoutée à la typogaphie caractéristique de la marque, suscitait un risque de confusion dans l'esprit du consommateur.
En statuant ainsi, au regard des conditions d'exploitation de la marque apposée sur les produits tels qu'ils étaient commercialisés et non à celui de la marque semi-figurative telle qu'enregistrée, la cour d'appel a violé les articles L. 713-3 et L. 716-1 du CPI, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019.
La cour d’appel a également jugé que les sociétés poursuivies avaient commis des actes de parasitisme. Elle a retenu qu’elles s’étaient inscrites dans le sillage de la société demanderesse pour tirer profit de ses investissements, ainsi que de l'image de marque du produit copié et de la notoriété de la marque PALLADIUM, sans bourse délier. Elle a ajouté que le préjudice causé à la société demanderesse résultait du fait qu'elles s’étaient immiscées dans le sillage de cette société et avaient profité de ses investissements, de sa réputation et de l'attractivité de ses chaussures auprès de la clientèle et qu'elles s'étaient positionnées comme des concurrentes directes de celle-ci.
En se déterminant ainsi, sans caractériser d'actes distincts de ceux qu'elle avait retenus par ailleurs au titre de la contrefaçon de la marque PALLADIUM et du modèle de chaussure déposé par la société demanderesse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du Code civil.
Cour de cassation, ch. com., 28 juin 2023, 22-10.759 (M20230085)
Sissi Perla SARL et Auberstar SARL c. KSGB Europe SAS (venant aux droits de la Sté Palladium)
(Cassation partielle CA Lyon, 1re ch. civ. A, 25 nov. 2021, 18/08615 ; D20210068 ; PIBD 2022, 1177, III-7)
[1] Sur la question de la prise en compte, par les juridictions françaises et de l’Union européenne, des conditions d’exploitation de la marque dans le cadre de l'appréciation globale du risque de confusion, voir la note de Christophe Schweickhardt parue au PIBD sous un arrêt rendu par la CJUE suite à une décision de l’EUIPO en matière d’opposition (CJUE, 4e ch., 4 mars 2020, Equivalenza Manufactory SL, C-328/18 P ; M20200166 ; PIBD 2020, 1147, III-4 ; L'Essentiel, mai 2020, note de A. Lebois). Plus récemment, la Cour de cassation s’est prononcée à plusieurs reprises sur ce sujet (Cass. com., 11 janv. 2023, Saint-Gobain Isover SA c. Bruno O et al., 21-20.437, M20230003, PIBD 2023, 1198, III-3, LEPI, mars 2023, p. 5, note d'A.-E. Kahn ; Cass. com., 14 avr. 2021, Thibault D et al. c. Capi SAS et al., 18-21.695, M20210099, PIBD 2021, 1162, III-2).